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 Macha T.04 (série) : Le cabinet des Merveilles [G]

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Xian Moriarty
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Macha T.04 (série) : Le cabinet des Merveilles [G] Empty
MessageSujet: Macha T.04 (série) : Le cabinet des Merveilles [G]   Macha T.04 (série) : Le cabinet des Merveilles [G] EmptyMar 5 Juil - 16:26

Le Cabinet des Merveilles
(épisode 4)

*************************

Chap.01



Il faisait beau ce matin-là.
D’un pas vif et dynamique, une belle femme aux allures hommasses arpentait les rues de Paris pour rejoindre le lieu où elle avait résidé ces derniers mois. Un petit sac de toile jeté sur l’épaule, elle marchait d’un air décontracté, un sourire aux lèvres. Ses sublimes yeux verts observaient le ciel bleu qu’aucun nuage ne venait ternir. Un vent frai faisait virevolter ses cheveux noirs de jais, ainsi que les longues franges de son épais bandeau verdâtre et sa ceinture.
Elle arriva enfin devant une haute maison à pans de bois. Sur son mur pignon était accrochée une enseigne indiquant que l’endroit était une boutique d’apothicaire. La jeune femme hésita à enfoncer la porte, car elle savait que cela ferait hurler le maître des lieux. Et elle aimait cela. Finalement, elle entra normalement. Quand elle poussa la porte, une clochette sonna.
Le Toulousain, le propriétaire des lieux, était à son comptoir en pleine lecture. Quand il releva la tête pour accueillir son client, l’homme ne put retenir un cri de joie.
« _Macha ! »
Le visage de l’apothicaire, âgé d’une quarantaine d’années, s’illumina. Il remit ses petites lunettes sur son nez tout en repoussant sa longue queue de cheval dans son dos. Il était heureux de voir sa jeune amie revenir. De plus, tout en elle indiquait qu’elle était en paix avec elle-même, ce qui contrastait avec la dernière fois où il l’avait vu. Son séjour loin de Paris lui avait visiblement fait un bien fou.
Cette dernière lui rendit son sourire. Elle était contente de voir qu’elle avait manqué.
Le Toulousain alla à sa rencontre et la sera fort dans ses bras. Il lui fit part de ses impressions, ce qui ne fit qu’augmenter la joie de Macha. En gentilhomme qu’il était, il la débarrassa de son petit sac, ainsi que de sa longue veste noire.
Ayant entendu crier le nom de la jeune femme, Margot s’était précipité à la rambarde la mezzanine. L’enfant de treize ans avait créé un lien affectif fort avec Macha. Ses yeux brillèrent de mille feux en voyant son amie. Elle dévala les escaliers quatre par quatre avant de se jeter dans les bras de son amie. Sous le choc, la jeune femme manqua de tomber à la renverse.
« _Te revoilà ! Ho Macha ! Alors, raconte ! Comment que c’était chez Richelieu ? Raconte !!! »
« _Holà doucement jeune fille. » Dis doucement la nouvelle venue, « Je viens à peine d’arriver que tu m’assailles de questions. J’aimerais poser mes affaires, grignoter une miche de pain et prendre un bon verre d’eau. »
Margot rougit. Elle se sentait gênée d’avoir ainsi agressé son amie. Elle la lâcha. Macha put enfin reprendre son souffle. Elles échangèrent des sourires de satisfactions.
Le Toulousain les invita à regagner la mezzanine pendant qu’il allait chercher ce qui satisferait les désirs de la nouvelle arrivante.
Appuyé à la rambarde de la mezzanine, un homme, portant la casaque des mousquetaires du Roi, regardait d’un œil tendre les retrouvailles des deux femmes. Ses longs cheveux châtain foncé lui tombaient sur les épaules, ses mèches cachaient ses yeux sombres. Il était également heureux du retour de la jeune femme. Cependant, il n’avait pas voulu se joindre à la petite fille. Il connaissait bien Macha et il savait qu’un tel geste de tendresse de sa part lui aurait valu de violentes représailles.
Machinalement, Macha leva les yeux. Elle vit Tolbiac la regarder avec un air d’abruti fini. Il avait l’air d’une demoiselle de petite vertu attendant son client en relevant les mèches de ses cheveux.
« _Tolbiac, tu sais que tu es le nuage noir de mon ciel bleu ! »
L’intéressé grimaça. Il s’attendait à ce genre de gentillesse dans la bouche de son amie. Mais elle lui avait dit avec un tel calme qu’il trouva cela presque anormal. Il avait tellement l’habitude de se faire agresser verbalement, et parfois physiquement. Le mousquetaire sourit et lui rendit sa remarque désagréable par une douceur.
« _Au moins, je suis quelque chose pour toi. Ce qui, en soi, est déjà un exploit ! » Répondit-il tout en brossant du doigt sa moustache finement taillée et sa barbiche. Macha rit jaune, mais n’ajouta rien. Mais il continua sur les petites remarques.
« Mademoiselle se met à la soie à ce que je vois. »
La jeune femme jeta un coup d’œil rapide aux manches de sa chemise de soie blanche. Il est vrai que jusqu’à maintenant, elle avait toujours porté des vêtements en toile de lin.
« _Cadeau de son Éminence pour service rendu à l’État. » Répondit-elle avec une pointe de mépris en arrivant à l’étage. « Je trouve ce genre de remarque assez mal placé de ta part môsieur le précieux. Tu t’es regardé avec tous tes frous-frous et tes dentelles ?
_Certes, mais moi, j’assume d’être issu d'une noble lignée. »
Macha ne l’écoutait déjà presque plus. Elle avait continué de gravir les marches pour se rendre au second étage où une chambre lui était réservée. Rien n’avait bougé depuis son départ. Les étagères étaient toujours pleines de livres. Son lit était fait, des couvertures d’aspects neufs recouvraient un épais matelas de paille et un gros coussin en plume. Une seule chose avait cependant changé. Sur la table qui lui servait de bureau se trouvait un coffre en bois précieux. Sur le couvercle se trouvait une petite clé ainsi qu’une lettre. Cette dernière contenait un message signé de ses trois compagnons : Tolbiac, Enguerrand et Le Toulousain. Il n’y avait que quelques mots : pour ranger ton diadème*. La jeune femme fut touchée par tant d’attention de la part de ses amis. Sa première initiative fut de récupérer son précieux bijou. Ce dernier était caché dans un petit sac qu’elle glissait entre le sommier de son lit et le matelas. Il y avait peu de chance qu’on vienne le lui voler, mais Macha préférait éviter de l’exposer. C’était l’un de ses rares biens et elle y tenait plus que tout au monde. Elle observa un long moment le diadème. Les deux serpents qui le composaient s’entremêlaient tout en tenant dans leur gueule une sublime émeraude. Un sentiment de tristesse l’envahit. Elle aurait tant voulu… Mais le choix d’un homme en avait décidé autrement. Machinalement, son regard porta vers sa bague représentant deux corbeaux, également emmêlés, dont les yeux étaient incrustés de pierre rouge. Elle eut un petit sourire nostalgique avant de pousser, un soupire. Puis elle alla placer son précieux diadème dans le coffre qu’on lui avait offert. Par contre, elle ne sut quoi faire de la clé. La garder sur elle pouvait être dangereux et surtout le meilleur moyen de la perdre. La cacher était presque stupide, mais elle ne voulait pas la laisser exposer aux yeux de tous. Elle se contenta de la placer sur le haut d’une des petites bibliothèques qui garnissaient sa chambre. Bien que les livres soient des objets chers, Le Toulousain en avait une très belle collection.
Le moment d’émotion passé, Macha décida de se mettre à l’aise. La soie était une matière bien trop chère et noble pour que la jeune femme ne la porte en permanence. Surtout avec Enguerrand et Tolbiac qui avaient le don de s’attirer des problèmes. Elle troqua donc sa belle chemise avec une classique, c’est-à-dire une en lin. La journée s’annonçait chaude. Macha prit la décision de ne pas remettre son corset. Elle noua sa ceinture en tissu verdâtre puis descendit rejoindre ses amis. Son ventre criait silencieusement famine.
Tolbiac et les autres étaient tous installés autour de la table. Un énorme pain, un pichet d’eau et un reste de jambon l’attendaient patiemment. Ces amis tentaient de calmer Margot qui sautillait sur son tabouret et posant des centaines de questions.
« _J’espère que ces modestes mets te satisferont, dit humblement Le Toulousain en voyant arriver son amie.
_C’est parfait ! se réjouit la jeune femme.
Elle prit un tabouret et je mis à côté de l’enfant qui ne cessait de la dévorer des yeux. Macha était vraiment un modèle pour elle. Margot continuait de bondir sur son tabouret en attendant que son amie lui raconte son séjour chez l’un des hommes les plus importants de ce pays. Suite à la tentative d’assassinat du Roi Louis XIII, de son frère Gaston d’Orléans et de son premier ministre le Cardinal de Richelieu, Macha avait été chargée – ou contrainte – qu’enquêter sur cette affaire. Cela l’avait énormément éprouvé psychologiquement. À la fin de cette éprouvante aventure, le premier ministre du Roi de France l’avait cordialement invité à se reposer dans sa résidence de province.
Avec les sourires qui ne cessaient d’illuminer son visage, ses amis étaient convaincus que son séjour à Luçon lui avait été plus que bénéfique.
“_Alors, alors !! Raconte !” répétait sans arrêt la petite rouquine.
_Ho, tu sais, il n’y a pas grand-chose à dire. J’ai passé deux semaines à me prélasser dans un lit au matelas de plume. Je dormais jusqu’à midi, mangeant plus que de raison, boire comme un puits sans fond et je finissais mes journées écrouler sur un canapé de velours avec un chat sur mes genoux. La vie de château quoi…. »
Margot avait des étoiles dans les yeux. Elle s’imaginait sa belle amie dans de somptueux habits dans des pièces aux luxes tout aussi exubérants.
_Et puis ? Et puis ?
_Et puis quoi ? Je n’ai rien fait de bien extraordinaire…
_Et la cohabitation avec Richelieu ? Il n’était pas trop dur à vivre ? demanda Tolbiac.
_Ma foi, Rich’…
_Rich’ ? l’interrompit le mousquetaire.
_Oui, Rich’, c’est le petit nom que je lui donne pour le faire enrager. Et je peux t’assurer que c’est assez jouissif… Mais passons. Rich’ est assez facile à vivre mine de rien. C’est un homme cultivé. D’ailleurs, Le Toulousain, j’ai souvent pensé à toi en voyant sa bibliothèque. Il se vante d’avoir près de 8 000 ouvrages. Je ne les ai pas comptés, mais je pense qu’il dit la vérité.
_Ha, que j’aimerais aussi voir autant de livres, soupira Le Toulousain, un petit sourire envieux aux lèvres.
_Après, il ne faut pas oublier que ce cher Rich’ est un politicien de talent et un homme d’Église. Il peut être très désagréable quand il veut. Mais bon, nous nous sommes très bien entendus.
Macha continua de parler de son séjour. Elle parlait avec amour des chats qui logeaient chez le Cardinal. La jeune femme aimait ces animaux. Richelieu lui avait même proposé de lui en offrir un. Elle avait refusé, car elle ne voulait pas imposer un animal chez son logeur. Le Toulousain l’invita à accepter un si précieux présent la prochaine fois. Un peu de compagnies au comptoir ne serait pas pour lui déplaire. Margot semblait aussi emballer à l’idée d’accueillir une de ces charmantes boules de poils.
_J’ai eu parfois l’impression que Rich’ m’aurait offert tout ce que je lui aurais demandé. Si je l’avais écouté, je serais revenue avec un cheval, des dizaines de chemises de soie, de nouveaux corsets, des bijoux et tout un tas d’autres choses…
_Pourquoi t’as pas accepté ? lui demanda Margot stupéfaite. Elle ne comprenait pas pourquoi son amie avait refusé tant de présent.
_Parce que je n’avais pas envie. Tu sais ma petite, un homme qui t’offre trop de présent est surtout un homme qui à une idée derrière la tête. Mais j’aurai peut-être du accepté un corset…fit-elle par ironiser.
_Tu as bien fait. Richelieu est peut-être cardinal, mais les rumeurs courent qu’il aurait…des désirs que sa soutane lui interdit d’avoir.
Tolbiac essayait de parler par sous-entendu pour que la jeune fille ne comprenne pas ses propos. Ce dont ils allaient parler n’était pas de son âge.
_Ha ça ! Je peux te le confirmer. Mais comment l’en blâmer. Avant d’être un homme de Dieu, Rich’ est un homme tout court…
_Il t’a fait des propositions » ? s’étonna Le Toulousain.
_Non, il n’est pas complètement fou non plus. Mais vu le nombre de fois où son regard s’est posé sur ma poitrine, il n’y a pas tellement de doute à avoir. »
Cela dit, Macha fit comprendre qu’elle ne souhaitait pas s’étendre sur ce sujet. De plus, ce n’était pas la peine que Margot soit mêlée à ce genre de conversation d’adulte. Elle aussi subtilement comprendre qu’elle faisait ce qu’elle voulait de son corps. Si elle avait envie d’un homme, ses amis n’avaient rien à dire sûr ça. Cette remarque fut lancée principalement à l’attention de Tolbiac.
« _D’ailleurs, lui et toi partagés de nombreux points communs, s’amusa la jeune femme.
_Ha bon vraiment ? se moqua l’intéressé.
_Vous vous appelez tous les deux Armand, vous êtes ducs…
_Ho, si ce n’est que ça.
_Vous tenez tous les deux à Macha…s’amusa Le Toulousain. D’ailleurs, ce dernier fut surpris que les deux zigotos ne se soient pas encore méchamment disputer. La bonne humeur communicative de Macha allait peut-être persister malgré la présence du mousquetaire. Macha ne détestait pas Tolbiac, mais elle gardait une étrange rancœur au fond d’elle qui la poussait souvent à s’en prendre verbalement et physiquement à ce dernier.
Macha grimaça à sa remarque. Tolbiac aurait bien voulu répondre quelques choses, mais il avait si peur de prendre un coup qu’il s’abstint.
_Ils sont aussi cons tous les deux, surenchérie la jeune femme amusée.
_Toujours aussi aimable, répondit ironiquement le mousquetaire.
_Il faut aussi dire qu’entre duc et cul il n’y a qu’une lettre.
Le Toulousain et cette dernière éclatèrent de rire. Margot n’avait pas compris le jeu de mots de son amie. Quant à Tolbiac, il se contenta d’une grimace.

Il était presque midi quand la porte de la boutique du Toulousain fut violemment foncée. Le propriétaire des lieux toujours dans la mezzanine ne put s’empêcher de crier à l’attention de ces clients. Ah ! qu’est-ce que ça pouvait l’énerver que l’on fasse ainsi claquer cette porte. Les gens n’avaient-ils aucune éducation ?
Il se leva pour se rendre au rez-de-chaussée pour y servir ses clients quelque peu bruyants. Mais avant qu’il n’ait fait un pas, une voix cria à l’aide.
Par réflexe, Macha et Tolbiac bondirent de leur chaise pour se précipiter à la rambarde. Le Toulousain, lui, s’était déjà élancé dans les escaliers.
Macha fut affligée par ce qu’elle vit. Deux hommes, portant la casaque des gardes du Cardinal, en soutenant un troisième. Et ce troisième homme, c’était Enguerrand. Ce dernier avant deux blessures, une à l’épaule et une à la cuisse. Les plaies saignaient abondamment me ne semblaient ne pas être mortelles. Du sang coulait aussi de son nez et une de ses lèvres était fendue.
“_Ca, bizarrement, ça ne m’avait pas manqué.” Soupira d’un air maussade la jeune femme.
À la demande du Toulousain, les gardes montèrent leur compagnon au premier étage, à la mezzanine. Ils installèrent le blessé sur une chaise.
“_Qu’est ce qui s’est passé ?” demanda le mousquetaire.
Un des gardes le regarda d’un air mauvais avant de lui répondre. Comme toujours, un affrontement avait eu lieu entre les deux corps de garde. La rivalité entre les mousquetaires du Roi et les gardes du cardinal de Richelieu étaient une véritable catastrophe. Il n’y avait pas une semaine sans qu’il n’y ait d’affrontement. Les morts pouvaient se compter par dizaines dans les deux camps.
Enguerrand et Tolbiac étaient des légendes vivantes, car ils étaient les seuls à appartenir à chacun des camps et à s’entendre. Ils se prenaient de temps en temps à ce jeu des rivalités, mais jamais ils n’avaient osé aller jusqu’à tuer leurs adversaires pour si peu.
Macha trouvait ces affrontements affligeants. Mais que pouvait-elle faire mise à part à jouer les infirmières ?
“_Ho, ce n’est pas grand-chose !” se moqua le blessé. “Un petit peu de baume, un peu de fil et tout sera finit.” Les grimaces qu’affichait son visage disaient des choses bien différentes.
_Tu as surtout l’air très malin dans cet état ! Tu riras moins quand c’est ton cadavre que l’on ramena ici sombre idiot ! le réprimanda Macha.
_Oh, mais je l’ai fait exprès tu sais ! J’avais tellement envie que tu t’occupes de moi, se moqua Enguerrand.
Le Toulousain arriva avec une bassine d’eau dans les mains, des bandages sur l’épaule. Margot, qui l’avait rejoint quand les gardes étaient arrivés, portait plusieurs pots.
En réponse à la moquerie de son ami, Macha alla prendre le récipient de l’apothicaire ainsi que les bandelettes. Enguerrand voulait qu’elle joue les infirmières ? Alors elle allait satisfaire son souhait.
Quand Enguerrand vit ce que son amie était en train de préparer, il pâlit. Il se souvenait de la manière dont elle avait soigné Tolbiac et Sagamore** alors de l’affaire de la secte de l’Horloger.
“_Mais je rigolais Macha !!
_Et bien moi pas ! Vociféra-t-elle.
Avec un peu de chance, cette séance de soin – ou de torture — lui ferait passer l’envie de se battre en duel.
Le Toulousain et Tolbiac regardaient les événements à venir avec un œil amusé. Ce coup-ci, Enguerrand l’avait cherché. Combien de fois le mousquetaire lui avait-il dis de ne jamais provoquer la jeune femme ? Peut-être retiendra-t-il la leçon aujourd’hui. Cependant, les gardes ne voyaient pas la chose de cette manière. Quand ils comprirent que la jolie jeune femme n’avait pas du tout l’intention de se montrer tendre avec leur camarade, ils tirèrent leurs épées pour qu’elle reste loin de lui.
‘_Holà demoiselle. Nous ne vous laisserons pas vous en pendre au sieur Du Lyonnais !’
Macha fronça les sourcils. Où se croyaient-ils pour lui parler ainsi ? Heureusement, le blessé vint apaiser ses compagnons. Mais le mal était fait.
La jeune femme, n’appréciant pas les menaces, passa entre les rapières sans la moindre peur. Les paroles d’Enguerrand lui avaient facilité le passage. Quand elle voulut le soigner, le garde lui demanda gentiment de laisser Le Toulousain faire. Elle hésita un moment.
‘_C’est d’accord ! Je ne suis pas là non plus pour vous chaperonner !’ En parlant ainsi, elle s’adressait aussi à Tolbiac. Cependant, ce dernier revenait assez peu souvent blesser. D’après les gens d’armes, le mousquetaire était la plus fine lame du royaume. Si Macha ne pouvait pas aller à l’encontre de ces dires, elle nuançait ces propos en rappelant que Tolbiac avait hérité de son père une botte secrète qui le sortait souvent des mauvais pas.
Un des gardes, visiblement assez jeune et fraichement arrivé, s’offusqua de la manière dont la jeune femme parlait au blessé. Il ne se gêna pas pour le faire savoir.
‘_Comment osez-vous parler ainsi au sieur Enguerrand du Lyonnais, Vicomte de Coligny ?!’ Il tenait toujours sa rapière dans la main. Son compagnon, lui, avait remis l’arme au fourreau.
Macha leva un sourcil en signe de surprise. Puis elle se retourna vers Enguerrand.
‘_T’es vicomte toi ?’ s’étonna-t-elle.
_Je ne te l’avais jamais dit ? Mais quel idiot je fais ! Excuse-moi.” Il se tourna vers le jeune garde. “Range moi cette épée tu veux ! Tu n’en auras nul besoin ici !”
Le jeune homme obtempéra à contrecœur.
_Rien de bien étonnant à cela, se moqua Macha. Car dans vicomte, comme dans comte d’ailleurs, il y a con ! »
Son pic fit son effet sur tout le monde. Sauf sur le jeune impétueux qui n’en fut que plus offusqué. Il s’adressa alors à Enguerrand.
« _Enfin monsieur, comment pouvez-vous laisser cette cul-terreuse vous parler ainsi ! »
Personne ne dit rien. Tous, ou presque, savaient que le jeune homme venait de prononcer la phrase de trop. Le second garde, qui ne connaissait pas personnellement Macha, avait eu l’occasion de la voir à l’œuvre lors de l’attentat contre le Roi et Richelieu. Il avait vu comment elle avait remis à sa place le mousquetaire Tolbiac et Sagamore, le bras droit de Gaston d’Orléans. De plus, les récits la concernant allaient bon train. Il n’avait donc rien osé dire.
« _Une cul-terreuse ? » répéta Macha faussement amusée.
Il est vrai qu’avec sa chemise de lin, elle avait bien moins de prestance que lorsqu’elle avait celle de soie. Sans oublier que son corset ajoutait de la noblesse à son allure. N’ayant ni l’un ni l’autre, avec son bandeau qui ornait sa tête, on aurait presque pu le prendre pour une paysanne sortie de son trou. La balafre qui serpentait sur la partie droite de son visage lui faisait aussi perdre en respectabilité. Généralement, c’était les gens peu recommandables qui arboraient ce genre de marque. Et si on ajoutait à cela ses allures hommasses, Macha n’avait pas grand-chose de respectable.
Un sourire froid apparut sur son visage. Puis, sans crier gare, elle saisit le jeune garde par le col et par sa ceinture.
Surpris par la poigne de Macha, l’insolent ne se débattit pas.
Sans ménagement, une expression de colère sur le visage, la « cul-terreuse » passa le malheureux par-dessus la rambarde la mezzanine. Celui-ci s’étala à quelques centimètres du comptoir dans un cri de douleur.
« _La prochaine fois, gamin, retient tes paroles ! »
Quand elle se retourna vers le reste du groupe. Un silence de mort régnait dans la pièce. Seuls les gémissements qui provenaient du rez-de-chaussée le brisaient. Encore ne fois, Macha venait de démontrer qu’elle avait un épouvantable caractère et qu’elle n’était pas du genre à se laisser faire. Cependant, ses excès de violence n’étaient pas du gout de tous.
Le Toulousain fut le premier à parler. Il commença par envoyer Tolbiac et le second garde voir le jeune homme. Si ce dernier s’était cassé quelques choses dans sa chute, il s’en occuperait. Un ou deux blessés, cela ne faisait aucune différence pour lui. Il roula des yeux en disant cela. Le comportement agressif de Macha ne semblait plus guère l’étonner.
« _Bon sans Macha ! Les mousquetaires nous amochent assez comme ça sans que tu passes nos nouvelles recrues par la rambarde. Aïe.
_Ho, s’il est costaud, ce sera plus de peur que de mal. Et puis, au moins, il se souviendra de cette leçon de politesse, ironisa cette dernière.
Les deux hommes, médecin et blessé, roulèrent des yeux.
Effectivement, hormis une lèvre fendue et quelques hématomes, le jeune homme n’avait rien.
« _En tout cas, tu nous as manqué ! Te voilà à peine revenu que tu as réussi à te moquer des ducs et des comtes et que tu as éjecté un garde du cardinal… se moqua Tolbiac.
_Pour une fois que c’est moi qui mets un peu d’agitation dans cette maison ! s’énerva Macha. _Allons rien de méchant” se rattrapa immédiatement le mousquetaire. Il ne voulait pas essayer le vol plané.
Les gardes du cardinal, voyant que leurs camarades étaient dans de bonnes mains, décidèrent de rentrer à leur caserne. La nouvelle recrue se montra même plus qu’empressée. Pendant tout ce temps, Margot avait observé les choses sans rien dire. Ah, Macha. Quelle femme de poigne. Secrètement, elle espérait un jour devenir comme son amie. Cette femme savait se faire respecter des hommes. Cependant, il y avait des choses que l’enfant ne comprenait pas, comme sa violence contre Tolbiac ou encore son étrange affection pour Sagamore, cet homme mauvais…
Le Toulousain mit plus de temps à soigner Enguerrand qu’il ne l’avait estimé, car les blessures étaient profondes. Quand il eut fini, l’heure de manger était passée depuis bientôt longtemps. La garde, épuisée, ne souhaita pas prendre part au repas et monta directement dans sa chambre, avec l’aide de Tolbiac.
Une fois un gros encas prit, l’apothicaire demanda aux deux demoiselles si elles voulaient bien aller au marché pour faire quelques achats. Le jambon à l’os avait disparu et il ne restait du pain que quelques miettes.






*voir “Macha : Le Diadème d’argent”.
** voir “Macha : La secte de l’Horloger”.


Dernière édition par Xian Moriarty le Lun 5 Sep - 19:20, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Macha T.04 (série) : Le cabinet des Merveilles [G]   Macha T.04 (série) : Le cabinet des Merveilles [G] EmptyDim 24 Juil - 21:03

Chap.02



Macha et la jeune Margot avançaient tranquillement en direction du marché le plus proche. L’enfant bondissait comme un cabri, ravie de profiter de l’après-midi avec son amie. Depuis que le Toulousain l’avait adopté, elle n’avait eu que peu de présence féminine à ses côtés. Elle prenait donc Macha comme modèle. Mais à cause de son jeune âge, Margot ne percevait pas les côtés sombres et violents. Elle ne voyait que sa force, son tempérament et son autonomie.
Les rues de Paris, dans cette partie de la capitale, étaient très sombres. La haute demeure en pans de bois, avec pignon sur rue, empêchait les rayons du soleil d’éclairer le dédale de ruelles. Heureusement, le quartier n’était pas un coup gorge comme celui pouvait l’être à d’autre endroit. Macha n’était donc pas tellement sur ses gardes, mais elle avait quand même une main sur ses armes, sa rapière et sa jian.
Les deux demoiselles mirent plus d’une vingtaine de minutes avant d’arriver sur une place où des étables, le long des maisons ou en plein milieu du lieu public. Vers l’extrémité nord, une halle abritait les vendeurs de viandes. Une épouvantable odeur de carcasses, de sang et de boyaux avariés englobait l’ensemble de la place.
Des marchands ambulants hurlaient à tout va pour revendiquer la meilleure marchandise. Des hordes de bedeaux serpentaient entre les étales, examinant les légumes et autres fruits. Des dames examinaient avec la plus grande attention des tissus de toutes sortes dans l’espoir de s’en faire une belle robe. De jeunes hommes les observaient de loin, en discutant à voix basse pour savoir laquelle de ces jeunes filles était la plus belle et laquelle ferait la meilleure amante. Les vieilles chaperonnes aigries regardaient d’un mauvais œil ses messes basses mal attentionner. Des miséreux, dispatchés aux quatre coins de la place et des halles mendiaient quelques piécettes. Des gamins plus faméliques les uns que les autres fouinaient entre les étalages quelques restes de légumes pourris pour remplir leur pauvre estomac.
Le Toulousain avait demandé à ce qu’elles rapportent un gros jambon à l’os, un pain de taille conséquente, et un ou deux poulets pour le diner de ce soir. Pour les légumes, il leur avait laissé le choix. En effet, hormis la viande, Macha avait des gouts difficiles, même si elle acceptait de manger tout ce qu’on lui proposait. La jeune femme espérait trouver une sorte de tubercule nommée crosne. Malheureusement, ce n’était plus la saison.

Après avoir tourné une bonne heure et ayant pu trouver tout ce qui leur convenait, Macha prit la décision de rentrer à la boutique. Cependant, elle voulait prendre quelques instants pour se procurer de nouveaux tissus pour soigner les blessures d’Enguerrand. À la vitesse où ce dernier et Tolbiac se faisaient estropier, les réserves de l’apothicaire allaient vite être vides. Margot grommela un peu. Leur achat était lourd et ses petits bras d’enfant commençaient à la faire souffrir.
Alors qu’elle s’attardait sur une étale qui semblait avoir des tissus de bonne qualité, un garçonnet, d’une huitaine d’années, vint lui quémander de quoi s’acheter à manger. Le commerçant voulut le chasser, mais la jeune femme l’en empêcha. Si elle ne pouvait pas changer la misère qui régnait dans ce royaume, et dans le reste des terres connues, Macha se sentit d’humeur d’aider ce garçon. Le sourire qui illumina le visage sale de l’enfant réchauffa le petit cœur de sa bienfaitrice. Puis il déguerpit à toute jambe, slalomant entre les passants.
« _Bon, on rendre ! finit par se plaindre Margot qui perdait patience.
_Tu peux commencer à rentrer toute seule. Il me semble que les rues de Paris ne t’ont jamais effrayé, se moqua Macha.
La fillette grimaça. Mais pour montrer qu’elle aussi avait du caractère, Margot ne se fit pas plus prier pour prendre le chemin du retour seul.
La transaction avec le tisserand fut bien plus longue que ce que la demoiselle avait estimé. Ce dernier se montra très dur en affaire. Elle se demanda si son excès de gentillesse envers le petit mendiant n’avait pas attisé la convoitise du vendeur. La prochaine fois, elle se montrera plus prudente.
Quand elle eut enfin fini, avec une bonne quantité de bandage sous le bras, elle prit le chemin du retour. Margot avait pris avec elle le plus gros des achats. Macha n’avait donc que les tissus, ainsi que quelques topinambours et autres tubercules. Le tout était fourré dans un sac de lin qu’elle portait à l’épaule.
Macha n’avait pas quitté la place qu’elle vit l’enfant qu’elle avait aidé un peu plus tôt. Ce dernier mendiait auprès d’un gentilhomme de belle allure qui accompagnait une jeune demoiselle. Il devait s’agir d’un père et de sa fille. La ressemblance entre les deux ne laissait aucun doute. Mais au lieu de la chasser d’un revers de main, il le frappa sans ménagement. Le garçonnet tomba au sol sous le coup. Macha fut horrifiée quand elle vit cet homme qui s’acharnait à coup de pied sur ce dernier. La fille du gentilhomme ne parut pas outrée de la violence de son père. Elle se contenta de rejoindre sa voiture, stationnée juste à côté d’une étale de soie. La populace autour de ce spectacle s’offusquait, mais personne n’osait intervenir. L’homme devait être quelqu’un d’important pour qu’aucune âme ne se dresse contre lui. Il devrait probablement être un noble.
Heureusement pour le garçonnet, Macha n’avait que faire de convenance sociale. Il était hors de question qu’elle laisse ce faux gentilhomme s’en tirer ainsi. L’enfant avait juste faim. On ne pouvait pas se comporter ainsi que les malheureux.
D’un pas rapide, elle gagna le lieu de l’altercation. Tirant sa rapière, elle arrêta net l’homme en lui plaçant sa lame sous la gorge.
« _Cela suffit, monsieur ! Vociféra-t-elle. Quel genre de personne êtes-vous pour ainsi molester un enfant ? »
Sa main tenant fermement la poignée de son arme, elle ne tremblait pas. Au moindre mouvement brusque, l’acier de son épée trancherait net la gorge de cette brute.
« _Comment osez-vous ! hurla l’homme. Je suis le comte de Chagny ! Ôtez cette arme ou il vous en cuira.
_Ho, mais ce sera avec grand plaisir monsieur. Mais il faudra d’abord que vous présentiez des excuses à ce jeune garçon. »
Une grimace de dégout s’afficha sur le visage du comte. Macha crut entendre ses dents grincer tant il semblait en colère.
« _Il est hors de question de j’ai quelques mots que ce soit pour ce gueux. Je suis de noble race et…
_Et vous êtes né du bon côté de la barrière ! Sachez monsieur que vous n’avez de noble que le titre ! Le jour où il vous faudra ramper devant les autres dans l’espoir de trouver une miche de pain pour remplir votre vide, vous aurez gagné enfin votre précieux titre de noblesse. Mais en attendant, excusez-vous…tout de suite, répliqua-t-elle, tout en faisait coulisser sa lame le long de la gorge du comte.
Ce dernier se renfrogna encore une fois. Il reste un moment silencieux, jetant des regards de haine vers l’enfant encore à terre, sonné par les coups. Il ne pouvait voir la personne qui la menaçait. En effet, Macha l’avait pris en joue par-derrière.
Comme Macha se faisait plus présente avec sa lame, le comte de Chagny finit par cracher les quelques mots que la jeune femme souhaitait entendre. La foule applaudit face à cette soumission du noble envers la populace. Le garçonnet, qui s’était éloigné, se trouvait encadré d’autres enfants tous aussi faméliques et crasseux.
Ravie des déclarations de ce nobliau méprisable, un sourire de satisfaction sur le visage, la jolie brune remit l’arme au fourreau. Pour elle, l’incident était clos. Elle désirait rentrer chez le Toulousain maintenant.
Cependant, le comte ne voulait pas rester sur cet affront déshonorant. Dès qu’il ne se sentit plus menacé, il se retourna vers son agresseur. Il était prêt à occire ce petit impudent qui avait osé le ridiculiser au milieu du petit peuple. Le noble fit volte-face en dégainant sa rapière. Quelle ne fut pas sa surprise en apercevant, une demoiselle avec deux armes à la ceinture. Son allure hommasse le laissa sans voix. Comment une telle personne, ainsi vêtue, pouvait-elle circuler sans être inquiétée ? La morale et la décence n’avaient donc plus autorité dans ce pays ? Il aurait préféré tuer lui-même son propre enfant plutôt que de la laisser s’exhiber ainsi. Quand il vit la balafre qui lézardait la partie droite du visage de son agresseur, il comprit immédiatement que cette femme était encore moins recommandable qu’il n’y paraissait. Elle devait être une mercenaire…
Le comte n’hésita pas une seule seconde pour exiger réparation. Macha esquissa un léger sourire moqueur. Elle savait qu’il était toujours dangereux de sous-estimer son adversaire. D’un mouvement d’épaule, elle fit tomber sur le côté ses achats. Avec grâce et élégance, elle sortit sa rapière, au pommeau serpentiforme, lentement en signe de provocation. Pour narguer de Chagny, elle effectué un rassembler avant puis le salua de sa lame. Certes, son salut fut sobre et rapide, mais en effectuant cela, elle montrait plus de noblesse d’esprit que son adversaire. Une expression narquoise s’afficha sur son visage, ravie à l’idée de ridiculiser ce nobliau une fois de plus.
Comme elle l’attendait, son adversaire n’eut pas les mêmes égards à son attention. Le comte ne la salua pas. Il l’attaqua directement par une pointe. Macha n’absolument aucun mal à la parer avec une seconde. De Chagny reproduisit le même mouvement plusieurs fois de suite, que la jeune femme contra systématiquement. À chaque fois, elle faisait exprès de ne pas contre-attaquer pour rendre furibond son adversaire. Au bout de quelques échanges, Macha décida de passer aux choses sérieuses. La foule les encerclait. Il ignorait le nom de la belle demoiselle armée, mais il l’encourageait. C’était assez rare de voir une personne issue du peuple s’en prendre ainsi à la classe dominante.
Le comte, lassé de ses pointes dans le vide, diversifia ses attaques, tête, genoux. Au moment le plus opportun, Macha para son adversaire. Avec force, elle balaya la lame de son adversaire et contre-attaqua en diagonale. Si son arme ne blessa pas le comte, elle lacera son pourpoint. Ce dernier, sidéré, fit un pas en arrière. En réponse à sa stupeur, la jeune femme fit une petite pichenette avec sa rapière. Encore un signe de provocation. Cela eut l’effet escorté sur de Chagny qui bondit sur elle. Macha, encore une fois, n’eut aucun mal à parer l’attaque qu’il porta à sa tête, avec une quinte. À la vitesse de l’éclair, tout en gardant les deux lames l’une contre l’autre, elle virevolta en avant, pour se retrouver aux côtés du comte. Elle se retrouva en position de force. Dissociant sa lame de celle de son adversaire, elle put porter une estafilade au flanc du comte. Mais n’ayant pas le désire de mettre à mort cet homme, la blessure qu’elle lui affligea ne fut que superficiel. Sous le coup, de Chagny tomba à genoux. Macha eut alors tout le loisir de menacer son adversaire de sa pointe, celle-ci diriger vers sa nuque.
« _Il me semble que ce combat est terminé monsieur, dit la vainqueur. Je ne suis pas là pour vous tuer.
_Cet affront ne restera pas impuni, grogna de Chagny.
_Très bien, je vous tue là maintenant, sous les yeux de votre fille. »
L’enfant du comte se trouvait sur les bords du cercle que formait la foule. Son regard était paniqué, apeuré. Les yeux de Macha n’avaient pas manqué de repérer cette demoiselle.
« _La prochaine fois que vous arpentez les allées d’un marché et qu’un pauvre enfant vous fait la mendicité. Contentez simplement de le renvoyer. »
À ces mots, la pointe de sa rapière vint sectionner le lien qui maintenant la bourse de son adversaire à sa ceinture. Elle la ramassa de la même manière avant de l’envoyer vers des enfants, dont le garçonnet qu’elle avait sauvé.
« _Partagez-vous ce qu’il y a dedans et rentrer chez vous. »
Sans se faire prier, les galopins s’emparaient du petit trésor que la jeune femme venait de leur offrir et déguerpir aussi vite que des ombres.
Cette fois-ci, l’incident était clos. Macha n’avait aucune envie de s’attarder en ce lieu. La foule continuait de la soutenir par des applaudissements et des cris. Le comte était hué et insulté. Mais la jeune femme ne prêtait pas attention aux acclamations, cela sonnait faux à ses oreilles. De plus, une sensation de déjà vu la m’était mal à l’aise. Plus vite, elle rentrerait, plus vite elle aurait la paix.
Elle rangea sa rapière, passa devant l’homme à genou, sans même lui lancer le moindre regard. Ses affaires lui firent rendu par une foule ravie. La fille du comte s’était jetée aux pieds de son père, pour lui porter assistance. Cette dernière était en pleur. Ses nerfs avaient lâché quand elle eu compris que son père ne serait pas mis à mort. Mais le comte ne semblait guère affecté par les larmes de son enfant.
Margot surgit alors de la masse attroupée autour de la scène de combat, au grand étonnement de Macha. La petite rouquine lui avoua qu’elle avait eu des remords de l’avoir laissé seule cause de son impatience. Elle avait alors fait demi-tour pour le rejoindre. La gamine fut enchantée du spectacle auquel elle venait d’assister. Elle ne se priva pas de complimenter son modèle sur sa grâce, sa maitrise de l’escrime, sa noblesse de cœur. La duelliste ne put s’empêcher de rougir sous la pluie d’éloges. Elle ébouriffa les cheveux roux de l’enfant en lui promettant qu’elle lui enseignerait l’art de l’épée. Margot répliqua qu’elle s’était bien entrainée malgré ces deux semaines d’absence. Elle mima rapidement les quelques mouvements qu’elle connaissait. Un sourire amusé apparu sur le visage de Macha.
Il était désormais temps de rentrer à la boutique. Les deux demoiselles n’avaient que trop trainé. De plus, la duelliste ne souhaitait pas avoir à se battre à nouveau.
Macha n’avait pas encore percé la foule pour prendre le chemin du retour que cette dernière se mit à hurler. Les premiers cris furent immédiatement suivis d’une détonation. On venant de tirer un coup de feu.
La jeune femme vit volte-face, une main sur sa rapière, une autre en position de protection sur Margot.
Le comte était allé jusqu’à son carrosse pour y récupérer une arme et avait tiré en direction de celle qui lui avait causé du tort. Heureusement, un homme, entre vingt-cinq et trente ans, de taille moyenne, les cheveux bruns, habillé de manière élégante et sombre, avait réussi à dévier le coup en levant le bras du vaincu vers le ciel. De la fumée sortait du canon qui pointait vers les cieux. Le regard de de Chagny exprimait toute sa colère et sa haine. Cet homme ne pouvait pas accepter la double offense que Macha lui avait faite. Il en allait de son honneur.
Comprenant que son coup d’éclat avait encore une fois échoué, le comte ne se fit pas prier pour rejoindre son carrosse au pas de course, sous les huées de la foule. Et grand bien lui prit, car certains commencer à hurler pour que ce lâche soit lynché. Macha du donné de la voix pour que la voiture du comte puisse quitter la zone sans être caillassée. Cependant, exclamation de la duelliste n’était pas très ferme. Un léger tremblement dans ses paroles se faisait sentir.
Bien qu’elle soit loin d’être émotive, Macha fut quelque peu secouée par cette tentative d’assassinat avorté. Elle, qui avait survécu à tant d’horreur, avait manqué de périr, tuer par-derrière avec une arme à feu. Elle avait imaginé bien des manières dont la Mort aurait pu la faucher, mais pas comme ça. Son corps allait encore montrer quelques signes de stupeur pendant quelques instants. Cependant, elle avait déjà retrouvé ses esprits. Et cela fut nécessaire pour rassurer la jeune Margot, tremblante comme une feuille auprès de son amie. Celle-ci était au bord des larmes… Macha la serra fortement contre elle en lui murmurant des paroles de réconfort.
L’homme brun, qui avait évité le pire à la jeune femme, s’approcha du duo qu’il salua poliment. Il parlait d’une voix douce, malgré le timbre grave de celle-ci. Ses yeux bleus couleur glace furent la première chose que remarqua Macha quand elle tourna vers lui. Ils dégageaient une certaine froideur, accentuée par ses cheveux sombres, légèrement bouclés, ainsi que par sa barbiche. Elle ne put déterminer son âge, mais il devait être légèrement plus jeune qu’elle. Les traits de son visage étaient durs, malgré le regard bienveillant qu’il porta sur les deux jeunes femmes.
« _Je vous remercie pour votre intervention monsieur, lui dit gentiment Macha en inclinant légèrement la tête en signe de respect.
_Tout le plaisir fut pour moi, répondit l’inconnu. Il m’est toujours plaisait d’aider une belle jeune femme, bien que j’ai pu remarquer que nous n’êtes pas du genre à en avoir besoin.
Son sourire était charmeur.
_Non, effectivement. » Elle tapota les poignées de ses deux armes. « Puis-je connaitre le nom de celui qui m’avait évité une mort tragique ?
_Je me nomme Maximilien de Milleroche, comte de Rochefort. »
Macha eut un petit rire moqueur. Décidément, c’était ça journée… L’intéressé ne parut pas embarrasser de la réaction de la jeune femme.
« _J’ose espérer, monsieur, que vous portez mieux votre titre de noblesse que l’espèce de larve à laquelle j’ai du mettre une correction.
_Soyez rassuré, les de Chagny ne sont pas réputés pour leur courage. Et vous ma chère, me feriez-vous le plaisir de vous présenter ?
_Macha, répondit-elle en toute simplicité.
Ils échangèrent encore quelques amabilités.
La place et le marché avaient repris son calme, comme si rien ne s’était passé. Les marchants hurlants encore à tout va les qualités de leurs marchandises, les mendiants quémandaient toujours au pied des étales, les demoiselles caressaient les tissus.
Margot, toujours accrochée comme une gamine de cinq ans aux jupes de sa mère, finit par réclamer de rentrer. Absorbée par la conversation qu’elle avait avec le comte de Rochefort, Macha avait presque oublié l’heure et les provisions.
Maximilien de Milleroche salua la jeune femme par un délicat baiser main avant de disparaitre parmi les allées. Quittant à son tour le marché, Macha jeta un dernier coup d’œil vers la place dans l’espoir d’y apercevoir son galant sauveur. Ce charmant jeune homme ne l’avait pas laissée indifférente.

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MessageSujet: Re: Macha T.04 (série) : Le cabinet des Merveilles [G]   Macha T.04 (série) : Le cabinet des Merveilles [G] EmptyJeu 28 Juil - 17:56

Chap.03

Le chemin du retour était très silencieux. Margot, encore un peu sous le choc, tenait la main de Macha. De l’autre, elle portait les provisions qu’elles avaient achetées. L’enfant avançait en regardait ses pieds, le regard vide. Elle voulait dire des choses à son amie, ce qu’elle ressentait, sa peur. Mais elle n’en avait pas la force. Jamais elle n’aurait pu se douter que dire ce que l’on avait dans le cœur et sur la conscience. Un sentiment de colère l’envahit. Cela était bien étrange que ce n’était pas dans ses habitudes d’être ainsi sous l’emprise de ce sentiment.
Macha lui demanda de trouver la force de lui parler, comme si la jeune femme avait senti la détresse de l’enfant. Magot mit un moment avant de pouvoir s’exprimer. Elle lui fit part de son admiration, puis de la peur et l’angoisse qui l’avait gagné quand elle avait entendu le coup de feu. Elle était au bord des larmes. Sa compagne de presque vingt ans son ainée, la tira auprès d’elle pour une accolade réconfortante.
« _Allez. Il faut te ressaisir maintenant. Il ne faut pas que soit déstabiliser pour si peu. Je suis, à de nombreuses reprises, passée plus près de la Mort que cela. Et celui qui me tuera n’est pas encore né. Ça, je peux te le garantir, ironisa-t-elle pour finir. »
Margot sourit malgré les larmes qui luisaient dans ses yeux. Macha avait le don de la rassurer. Un jour, c’est sur, elle sera comme elle. L’enfant s’essuya le visage d’un revers de manche.

Les deux amies devaient avoir encore la moitié du chemin à faire lorsqu’elles entendirent des appels à l’aide. Macha roula des yeux avec un sourire exaspérer. Deux altercations en une seule journée : elle allait bientôt égaler Tolbiac et Enguerrand à cette vitesse. Elle aurait préféré immédiatement, mais la jeune n’aurait pas eu la conscience tranquille en laissant quelqu’un en détresse derrière elle.
Margot lui lança un regard apeuré. Pas encore remise de ses émotions, l’enfant ne voulait pas voir son amie risquer sa vie encore une fois. Malheureusement, même avec ses yeux suppliants, elle n’avait pas le pouvoir d’allez à l’encontre des décisions de la grande et fière escrimeuse.
Macha ébouriffa les cheveux de la gamine avant de détaler à toute vitesse vers les cris. Elle invita Margot à ne pas bouger. Est-ce que la petite obéirait ? Rien n’était moins sûr.
La jeune femme courra à grande enjambée vers les appels au secours. Il ne lui fallut pas plus de trente secondes pour découvrir d’où venaient les cris. Dans une ruelle sombre due à l’encorbellement des maisons, un groupe d’homme habillé en sombre, avec des foulards sur le visage était en train de molester un vieillard. Quelle bande de lâches ! Qu’ils soient nobles ou du peuple, les hommes ne cessaient de sidérer Macha par leurs couardises. Six brutes pour rouer de coups un vieux…
De sa voix force et puissante, elle héla les agresseurs en posant sa main sur sa rapière. Ils allaient en tâter sous peu.
Quelques-uns des brutes levèrent la tête vers la voix qui venait de les alpaguer. L’un d’eux marmonna quelques choses dans son foulard. Cela eu pour réactions de faire rires ses compagnons. Deux délaissèrent leur acte de violence pour se tourner vers la nouvelle venue. Bien qu’elle ne fût qu’une seule, la rapière à sa ceinture signalait qu’elle cherchait le combat. Et ces derniers étaient tout à fait disposés à corriger cette audacieuse. Ils émirent de rires gras en sortant leurs épées du fourreau.
Macha leva un sourcil d’étonnement. Ils avaient des armes médiévales. Sa rapière et sa lame fine ne pouvaient pas faire le poids face à des armes de ce genre. Mais passez la surprise, elle sourit d’un air provocateur. Sa main se déporta vers le second pommeau qui pendant à sa ceinture. Sa jian serait bien plus efficace.
Comme avec le comte de Chagny, elle dégaina lentement son arme avec grâce et élégance, un rictus amusé aux lèvres. Les deux hommes parurent troublés par l’épée de leur adversaire, ils n’en avaient vu de telle. Mais peu importe, la donzelle ne pouvait pas rivaliser avec eux. Macha ne parut nullement effrayée par les deux brutes qui s’avançaient, l’air très amical, dans sa direction. Le combat ne devrait pas être trop dur. Dans le passé, elle avait déjà affronté ce genre d’individu ainsi armé. Elle espérait juste qu’elle n’avait pas trop perdu la main. Depuis qu’elle s’était installée à Paris, la jeune femme n’avait jamais eu l’occasion de se servir de sa jian.
Arrivé à distance de combat, le premier homme fit signe à son ami qu’il lui laissait entamer le combat. C’était aussi une façon de dire à leur adversaire féminin tout le mépris qu’il ressentait. Macha n’en fut nullement surprise. Les hommes avaient souvent ce genre de comportement envers elle. Ils aillaient le regretter. Si elle avait fait preuve de clémence vers le comte de Chagny, la jeune femme n’allait pas faire de même avec ces brutes.
Les défauts des armes médiévales, bien que très puissantes, sont qu’elles sont lourdes et donc d’une maniabilité réduite. Macha n’eut aucun mal à esquiver le premier coup en feintant sur le côté. Ne voulant laisser aucune chance à son adversaire, elle répliqua immédiatement par une pointe qui fit mouche. La lame s’enfonça suffisamment dans la poitrine de l’homme pour que la blessure soit mortelle. Il s’effondra dans un râle de douleur.
Immédiatement, elle se remit en garde. Le second agresseur resta de marbre pendant une seconde, le temps de comprendre que son compagnon venait d’être terrassé en un seul coup ! Soit la donzelle avait eu une sacrée chance, soit elle était une escrimeuse de talent. Ne préférant prendre aucun risque, la brute opta pour la seconde option. Ce qui fut un choix judicieux. Mais cela ne lui suffit pas pour rester en vie. Lui et Macha échangèrent quelques passes d’armes. L’homme était puissant et lent, la demoiselle rapide et agile. Mais elle manquait de force pour le tuer. Si elle voulait en finir avec ce combat pour porter assistance au vieil homme, il lui fallait jouer les cartes de son adversaire.
Quand elle jugea le moment opportun, elle mit toute sa puissance dans une parade en quinte. Puis, comme avec le comte, elle virevolta vers la brute pour se retrouver à ses côtés. Il avait donc sa garde grande ouverte. Elle put alors effectuer une attaque, avec la lame de sa jian, sur le flanc de son adversaire. Une large entaille rougeâtre apparue sur son buste. À son tour, il s’effondra.
Le cri que l’adversaire émit en tombant au sol alerta ses compagnons, toujours à molester le vieillard. Ces derniers stoppèrent leur sale besogne. Ils regardèrent tous ne direction du combat. Macha s’était déjà remis en garde, sa lame rouge du sang de ses adversaires, tandis que deux corps gisaient à ses pieds.
Les agresseurs hésitèrent un moment. La jeune femme qui se tenait en face d’eux venait d’occire, sans trop de difficulté, deux hommes. Devaient-ils lui régler son compte ou bien détaler ?
Celui qui semblait être le chef fit un signe à l’un de ce comparse. Le désigné sortit son épée et se dirigea vers Macha. Ce dernier était prêt au combat. L’homme était bien plus grand que son adversaire féminin et le double au niveau des épaules. S’il jouait sur sa force physique, la jeune femme serait vite mise à mal. Mais celle-ci ne leva pas un sourcil. Ce n’était pas la première fois qu’elle se retrouvait face à ennemi plus corpulent qu’elle.
Bien sur ses appuis, Macha laissa la brute s’approcher. Elle était très attentive à chacun des mouvements de son adversaire. S’il attaquait le premier, l’avantage serait de son côté. Sa patience et son visage narquois provoquèrent chez le brigand un excès de confiance. Probablement qu’il pensait que sa force lui donnait l’avantage. Quelle erreur. Mais avec ce genre d’individu, c’était toujours la même chose. Peut-être un excès de virilité ? Quoi qu'il en soit, Macha était toujours sortie victorieuse. Et encore une fois, cette vérité ne fut pas contredite.
La brute attaqua. Macha esquiva plusieurs fois. Elle finit par parer un des coups porter en diagonale. Mais le choc fut si violent que les ondes parcoururent ses membres. Cela eut pour conséquence de lui faire lâcher son arme. Un bond en arrière lui permit d’éviter une pointe. Il tenta alors de la décapiter en balayant tout l’espace devant lui. La jeune femme plongea en avant. Elle passa sur les côtés de son adversaire. Dans ce mouvement félin, elle saisit la dague qu’elle dissimulait dans une de ses bottes. En se relevant, elle planta la fine lame dans le flanc de la brute. Ne prenant pas garde à la chute de son adversaire, elle bondit pour récupérer sa jian. Elle se remit en garde, face au corps agonisant.
Le groupe de brigand avait cessé de molester leur victime. Les visages maqués ne cachaient pas leur étonnement. Comment cette femme avait-elle pu mettre au tapis aussi facilement trois des leurs. Ils se jetèrent des regards interrogateurs. Finalement, celui qui paraissait être le chef leur fit signe. Ils détalèrent comme des lapins face à un renard. Macha hésita à les poursuivre. Mais le vieil homme avait surement besoin d’elle.
La jeune femme victorieuse, une fois sûre qu’il n’y avait plus aucun danger, rangea ses armes. Mais avant, elle prit soin de les essuyer sur un des vêtements d’un des cadavres.
Allongée sur le sol, gémissant de douleur, la victime des brutes ne put se relever sans l’aide de Macha. Doucement, elle l’assit contre le mur d’une maison. Ce dernier avait une plaie, légère, sur le haut de son crâne, une auréole de cheveux longs entourait le somment de sa tête. Il portait des vêtements de très bonne qualité, de trop bonne qualité pour un simple bourgeois. La jeune femme ironisa intérieurement : décidément, tous les nobles de France croisaient son chemin…
« _Macha ! »
L’interpellée se retourna. Chargée des provisions, Margot arrivait envers elle en courant. L’enfant enjamba les corps comme si de rien n’était. Un large sourire illuminait son visage de rouquine.
« _Qu’est ce que tu fais là ?, gronda la jeune femme. Je t’avais dit de rester là où tu étais.
_J’avais peur toute seule là-bas, rétorqua la gamine. »
La belle excuse. Mais bon, elle était maintenant là et elle allait l’aider. Avec un des linges acquis au marché, elle banda la blessure du vieil homme. Ce dernier, l’air agars, ne semblait pas trop comprendre ce qu’il se passait. Margot avait décampé pour essaye de trouver un puits et de l’eau.
À l’aide de petite tape, Macha essayait de faire revenir sur terre la pauvre victime. Il reprit ses esprits une fois que l’enfant était revenue avec de l’eau. La fraicheur du liquide fit eu bien à l’ancien. Il sourit en voyant le doux, mais balafré, visage de la jeune femme.
« _Ca y est, je suis mort. Un ange m’accueille au Paradis. »
L’ange brun ne put s’empêcher de rougir. Cela faisait longtemps qu’on ne lui avait pas fait un tel compliment.
« _Je suis bien navrée de vous avouer cela, mais je ne suis pas un ange et vous n’êtes pas mort. »
L’homme écarquilla les yeux. Il vit alors la petite rousse, puis les trois corps qui gisaient non loin. Une expression de surprise s’afficha sur son visage. Il revint vers son ange et aperçu les armes à sa ceinture.
« _Est-ce vous qui les avez occis ? demanda-t-il en pointant du doigt les brutes.
_Oui, répondit-elle simplement. Maintenant, il faut vous mettre à l’abri avant que d’autres brutes de viennent chercher quelques ennuis.
_Vous avez raison. Mon hôtel particulier n’est pas très loin. »
Macha aida le vieil homme à se relever. Ce dernier eut du mal. En effet, ses frêles jambes avaient été bien amochées par les coups de ses agresseurs. La jeune femme passa son bras par-dessus son épaule et lui servit de canne. Le vieil homme gémissait à chaque mouvement. Certains hommes étaient de vrais lâches. Six brutes contre un ancien. Pas étonnant que le monde soit peuplé ce genre d’individu, les gens biens mourraient rapidement. Cependant, Macha estimant qu’il y avait une place entre le lâche vivant et le courageux mort.
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MessageSujet: Re: Macha T.04 (série) : Le cabinet des Merveilles [G]   Macha T.04 (série) : Le cabinet des Merveilles [G] EmptySam 10 Sep - 12:09

Chap. 04


Il fallut plus d’une demi-heure au petit groupe pour rejoindre l’hôtel privé du vieil homme. Ce dernier, malgré l’aide de Macha, se mouvait avec difficulté. Et Margot était à la traine avec toutes les provisions. L’enfant râlait. Les charges qu’elle portait étaient bien trop lourdes pour elle. La jeune femme, l’ancien sous le bras, lui répétait sans cesse que cela pouvait être une sorte d’entrainement. Le maniement de la rapière demandait quelques muscles. Surtout si la petite rouquine souhaitait également être initiée à quelques acrobaties.
La demeure, un hôtel particulier, était typique de son temps. Cependant, il était en très mauvais état. Son propriétaire n’avait-il plus les moyens de l’entretenir ? Ce vieux qu’elle venait de sauver était-il un noble désargenté, criblé de dettes de jeux ? Mystère. Ce dernier n’avait que peu parlé durant le trajet. Ses blessures, infligées par cette bande de brutes, le faisaient trop souffrir.
Une fois sur le perron. Macha ordonna à sa petite amie de rentrer directement chez l’apothicaire. Elles étaient parties depuis bien trop longtemps et la nuit n’allait pas tarder à tomber. Et la jeune femme ne voulait se promener avec une enfant dans la rue la nuit. La rouquine ronchonna avec force. Mais l’autorité de l’adulte triompha. C’est résigné, en grommelant et trainant des pieds, que la demoiselle prit la direction de la boutique de son père.
Quand Macha poussa la lourde porte de l’hôtel particulier, son nez fut agressé par les odeurs de poussières et de renfermé. Les quelques rayons du soleil qui pénétraient dans le hall révélaient une fine brume de particules. Il n’y avait pas qu’extérieur, qui était mal entretenu. Peu de lumière passait au travers des vitres crasseuses. Pendant un court moment, la jeune femme se crut dans un lieu en ruine et inhabité.
« _Je vous pris, mademoiselle, ne pardonner le manque de tenu de ma demeure. Mais je n’ai plus de domestique depuis fort longtemps. Et je n’ai pas la force d’entretenir seul cette partie de la maisonnée. »
La belle brune ne parut pas dérangée plus que cela. Si ce noble sieur ne souhaitait pas payer des gens pour nettoyer son logement, cela le regardait. Gentiment, le maitre des lieux lui demanda de la conduire avec l’étage. L’ascension des marches fut une épreuve pour le vieillard. Macha hésita à le soulever comme une donzelle, mais elle craignait de vexer son étrange hôte. Le couloir de l’étage était encombré de bibliothèques et de livres. Presque la moitié de l’espace destiné à circuler avait disparu à cause des meubles. Les petites fenêtres, de part et d’autre des couloirs, étaient obstruées par divers ouvrages, empilés les uns sur les autres de manière anarchique. Un courant d’air ou le déplacement d’un seul livre et toute la pile s’effondrait. La jeune femme remarqua cependant que l’endroit était plus propre que le rez-de-chaussée. Bien qu’une couche de poussière recouvre le sol et les bibliothèques, elle était bien plus fine que celle d’en bas. Par ailleurs, Macha vit que ses pas avaient laissé des empreintes sur les marches et les dalles de l’entrée.
Ils passèrent ensuite dans une salle. Là, la jeune femme eut le souffle coupé. Il y avait des dizaines, des centaines, des milliers d’objets de diverse taille, forme, matière qui encombraient l’espace. Même le plafond avait été mis à contribution pour stocker le bric-à-brac. En effet, des animaux empaillés, un crocodile et quelques oiseaux, pendant grâce à es fils. Les murs, quand aucun meuble haut ne les dissimulait, étaient recouverts de vitrines en verres avec des insectes den tous genres. Certes espèces devaient être exotiques et venir des colonies des Amériques, car la jeune femme n’en avait jamais vu de semblable. Sur les cadres, des petits pots d’allures et couleurs étranges, des figurines humaines ou animales, des objets étranges prenaient place.
Dans cette caverne d’Ali Baba, un léger chemin menait vers le fond de la pièce. Mais il n’était pas assez large pour laisser passer deux personnes l’une à côté de l’autre. Macha se demanda même si un adulte pouvait passer entre tous les meubles et objets.
À ce moment-là, le vieil homme se défit de l’aide de la jeune femme. Dans un haut pot placé juste à l’entrée, le maitre des lieux prit une canne. Des dizaines d’autres étaient disponibles. Le dos courbé par l’âge – et peut-être par une bosse ? — et avec sa nouvelle aide, le vieillard serpenta avec une certaine aisance dans tout ce fourbi, malgré ces blessures. D’ailleurs, il gémissait sans arrêt. En le voyant ainsi, Macha comprit que ce bordel n’était rien d’autre que son système d’organisation.
« _Venez mademoiselle, l’invita-t-il. »
À ça droite, elle croisa quelques fauves empaillés, un globe terrestre magnifiquement ouvragé, une bibliothèque avec des parchemins et des manuscrits. Dans une vitrine, elle vit une belle collection d’armes anciennes : épées, dagues, arbalète, couteau, mais aussi mousquet et autre pistolet. Sur un autre meuble, des dizaines de petites statuettes érotiques s’emboitaient dans diverses poses sexuelles. Macha leva un sourcil de surprise. Les gens de ce royaume se montraient assez pudiques à ce niveau même si, en coulisse, les choses étaient bien différentes. À gauche se trouvaient toutes sortes de coquillages, plus beaux les uns que les autres ; des herbiers grands ouverts sur leurs plus belles fleurs ou feuilles ; d’autres animaux, dont un énorme hippopotame, égayaient par leur couleur le gris de la pièce.
Jamais de toute sa vie, la jeune femme n’avait vu autant d’objets dans si petit espace. Tout en avançant, elle manqua de renverser un petit trépied sur lequel un chaudron en bronze, visiblement ancien, reposait. Dans le récipient, des sortes de haches, des fragments de lame et divers restes, également en bronze, avaient été déposés.
Au bout de l’allée improvisée, un espace, de quelques mètres carrés, était presque dépourvu de curiosité. Un bureau, recouvert de papier, de plume et d’encrier, ainsi qu’un lit, défait, était les seules choses qui encombraient la petite oasis. Une fenêtre laissait entrer de la lumière à cet endroit. Ce devait être le bureau et la chambre à coucher du propriétaire du lieu. Macha imagina alors que toutes les autres pièces devaient être aussi pleines de choses farfelues.
Le vieillard s’alita, épuisé par l’épreuve qu’il venait de vivre. Il invita sa sauveuse à s’approcher.
« _N’ayez pas peur. Même si je voulais vous manger, je n’ai aurais pas la force. »
Macha esquissa un sourire. C’est vrai que cet ancien n’avait rien d’un tueur. Et quand bien même il l’avait été, il n’était plus en état.
Voyant que son invitée balayait du regard son étrange collection, ce dernier prit la parole.
« _Bienvenue dans mon cabinet des curiosités, mademoiselle Macha… Cela est bien votre nom n’est-ce pas ? J’ai entendu l’enfant vous nommer ainsi ?
_ Effectivement, je me nomme bien Macha. Et sans vouloir me montrer grossière, me feriez-vous la confidence de me dire le votre ? se moqua-t-elle.
_C’est moi qui suis un grossier personnage. Vous me sauvez de ces truands et je ne prends même pas la peine de me présenter. Je suis Arthur de la Chaussenée, Baron de Villefranche. »
Deux comtes et un baron en une seule journée ! À ce rythme, Macha aura rencontré l’ensemble de la Cour d’ici la fin de semaine.
« _En tout cas, je ne peux que vous remerciez encore pour m’avoir porté secours. Sans vous, ces brutes m’auraient surement occis.
_Je vous en pris. Je n’ai pas pour habitude de laisser des vieillards se faire rouer de coups dans des hommes armés. Cependant, et pardonnez ma rudesse, j’aimerai savoir ce que ces gens vous voulaient ? Il me semble que la rapière est plus courante dans ce pays que les épées de type médiéval. »
Le sourire joyeux qu’affichait le baron s’effaça. Ses yeux déshabillèrent la jeune femme du regard. Son regard cherchait à savoir si sa sauveuse pouvait être digne de confiance. Et l’accoutrement inhabituel de Macha ne jouait pas en sa faveur. Ses armes encore moins. Mais elle s’était portée à son secours sans savoir ce qui se passait vraiment.
« _J’espère que vous m’en excuserez, je ne peux pas tout vous dire sur cet incident. Cependant, je peux vous assurer que vous avez fait le bon choix en me prêtant assistance. Ces hommes s’en sont pris à moi parce qu’ils désiraient s’approprier un de mes biens.
_Un bien que vous avez bien mal acquis et que d'autres souhaitent récupérer, questionna la jeune femme. »
Généralement, ce genre de remarque n’annonçait rien de bon. Macha espérait juste qu’elle ne s’embarquait pas dans une histoire de fou.
« _C’est obtenu ce…, il hésita, cet objet de manière totalement légal ! Cependant, d’autres personnes souhaitent découvrir…les secrets de cet artéfact. »
La conversation commençait à prendre une tournure plutôt… surprenante. Ce vieillard était-il une sorte d’illuminé pensait trouver un trésor ou une chimère dans un objet aussi bizarre qu’étrange ? Quoi qu'il en soit, Macha ne tenait pas tellement à être mêlée à ce genre d’aventure. Dans le genre fou furieux, la secte de l’Horloger lui suffisait amplement. Hors de question de ce lancer dans trip ésotérique.
Voyant que sa sauveuse affichait un air de suspicion, le baron tenta de la rassurer. Il n’avait rien d’un fou, accroché à des superstitions ridicules. L’objet dont il lui parlait contenant des secrets bien réels. Ces derniers ne relevaient d’une quelconque croyance ou superstition, mais bien d’une réalité concrète qu’il fallait mettre en œuvre.
Malgré ce discours qui se voulait rassurant, la jeune femme avait du mal à croire ce que le vieillard lui racontait. S’il était possible qu’il dise la vérité, il se pouvait aussi que cet homme soit tellement sûr de la réalité du dît secret qu’il ne pouvait le prendre une pour chimère.
« _Dîtes moi, jeune fille, vous qui semblez être une aventurière plutôt digne de ce nom, ne voudriez-vous pas, il hésita, veillez à ma sécurité, le temps que je réalise le « secret » de mon artefact.
_Je vous remercie de votre proposition, mais je me vois contrainte de refuser. Premièrement, je ne pense pas que vous ayez le financement nécessaire pour employer quelqu’un. Dans le cas contraire, cette demeure ne serait pas en ruine. Deuxièmement, malgré vos paroles pour me rassurer, je ne suis pas convaincue de la réalité du secret de votre si précieux objet. Et enfin, j’ai suffisamment de problèmes dans le monde extérieur sans me jeter dans un autre guêpier. Et ce, je vous salue. »
Macha tourna les talons dans l’intention de rejoindre ses amis. Le temps filait et la nuit allait bientôt tomber si elle s’attardait trop longtemps. De plus, la petite Margot devait se faire du souci.
« _Attendez, le rappela le baron, si je découvre le secret, je serais un homme riche ! Et je pourrais vous payer grassement ! Je vous le promets ! »
Mais la jeune femme ne l’écoutait déjà plus.

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Macha T.04 (série) : Le cabinet des Merveilles [G] Empty
MessageSujet: Re: Macha T.04 (série) : Le cabinet des Merveilles [G]   Macha T.04 (série) : Le cabinet des Merveilles [G] EmptyVen 30 Sep - 21:15

Chap. 05


Il n’y avait décidément rien à dire, les lits de plumes étaient bien plus confortables que ceux en paille. Les tiges de blés secs piquaient ou entrainaient des démangeaisons. Macha aurait presque préféré avoir à faire à des moustiques, il était possible de s’en débarrasser. De plus, un malotru avait descendu les escaliers, tôt ce matin, avait autant de délicatesse qu’un éléphant.
Le soleil n’était donc pas très haut dans le ciel lorsque la jeune femme sortit de son lit. Ses yeux étaient encore lourds, mais les démangeaisons l’agaçaient trop. Ses premiers réflexes furent de s’ébouriffer les cheveux dans le but de se débarrasser de tous les brins de paille qui s’y étaient logés. Sous l’effet de la fatigue, la jeune femme ne prit pas la peine de s’attacher les cheveux comme à son habitude. Elle se contenta d’un gros chignon. L’atelier coiffure viendrait plus tard, une fois bien réveillée, un bon petit déjeuné dans l’estomac. Elle troqua son habit de nuit avec son vieux pantalon et chemise de soie. De toute façon, Macha n’avait nullement l’intention de mettre les pieds dehors en ce jour. Son programme était de lézarder toute la journée. Au mieux, elle pourrait s’entrainer avec Margot. Un peu de sport lui ferait le plus grand bien. De plus faire travailler un élève lui permettrait de vérifier et de corriger ses petits défauts.
En quittant sa chambre, elle n’espérait qu’une chose : ne pas croiser l’éléphant de ce matin. Elle soupçonnait fortement Enguerrand. Tolbiac n’était pas assez fou pour risquer les foudres de la demoiselle, Le Toulousain trop respectueux des gens, idem pour Margot. De plus, ce dernier avait bu plus que de raison la veille au soir. Macha se demandait quelle pouvait bien être la meilleure punition possible : une cruche sur la tête ? Le nez écrasé sur la table ? Elle restait indécise, car son esprit était encore voilé par les voiles de Morphée.
La mezzanine était vide de toute présence. Soit l’éléphant avait compris ce qui allait lui arrivé et il avait vite détalé, soit il était retourné se couche en toute discrétion ce coup-ci. Quoi qu’il en soit, la jeune femme était bien contente de profiter d’un moment de solitude. Surtout après les conversations houleuses de la veille.
Lorsqu’elle était rentrée, tout le monde s’inquiétait. Si Margot avait mis de l’entrain dans son récit, enjolivant les événements en faveur de la jeune femme, cette dernière n’avait pas compris les problèmes que les duels pouvaient entrainer. Surtout avec le comte de Chagny. Si Le Toulousain ne connaissait rien à l’univers des nobles et des intrigues de courts, Tolbiac et Enguerrand en savaient bien plus. Si le de Chagny n’était pas très apprécié parmi la noblesse, il n’en restait pas moins un homme dangereux. L’affront qu’il avait subit n’en resterait pas là où Macha l’avait laissé. Et le comte pouvait très bien être le genre d’homme à faire abattre la responsable de sa disgrâce d’un coup de mousqueton dans le dos, ou d’envoyer une horde de soudards lui régler son compte. Les deux soldats avaient laissé entendre à leur amie qu’il serait avisé de faire savoir qu’elle pouvait être sous la protection du cardinal de Richelieu. Macha avait vivement protesté. Il était hors de question qu’elle soit sous la houlette de qui que ce soit, qu’il soit l’homme le plus important de France ou roi. Bref, ce point-là avait presque tourné au pugilat. Heureusement que Le Toulousain était bien diplomate que les deux autres. Mais l’accalmie fut de courte durée puisque le mousquetaire voulut en savoir plus sur le second incident, avec les hommes aux épées anciennes. Tolbiac fit remarquer le caractère insensé de son action. Ces brutes l’auraient taillé en pièce s’ils l’avaient attaqué en même temps. Macha n’avait pas apprécié, une fois de plus, qu’on lui fasse la morale. Elle était en vie et surtout, indemne. Que fallait-il de plus ! Cependant, Le Toulousain eut tendance à soutenir son camarade. Si ce n’était pas tellement les soudards qui l’inquiétaient, le commanditaire de ces derniers était une menace plus préoccupante. Il fallait juste espérer que ce dernier n’avait rien pu apprendre au sujet de la jeune femme. Heureusement, Macha n’avait pas accepté le marché du baron. Cette dernière s’offusqua : elle avait l’impression qu’ils la prenaient pour une inconsciente ! Et une fois encore, les discussions s’échauffèrent.
Énervée, la belle brune avait fini par quitter la mezzanine pour la solitude de sa chambre. C’est l’esprit agité qu’elle s’était mis au lit. Et puis il y eut la paille…

Macha se rendit au cellier, à la cave, pour y prendre de quoi prendre un petit déjeuner. Elle se saisit d’une grosse miche de pain, de fromage et pommes, achetées sur le marché la veille. Une envie d’un bon bol de lait la gagna. Mais elle n’eut pas le courage d’aller en quérir, d’ailleurs elle ne savait pas où en trouver dans les parages.
Tranquillement installée à la table, elle dégustait doucement son repas. Elle se rendit compte qu’elle n’aimait pas tellement ces moments de solitude. Sans qu’elle puisse comprendre pourquoi, son esprit ne lui rappelait que de mauvais souvenirs. Cela la contraria. Il fallait qu’elle tourne la page de son passée. Pas évident se dit-elle. Sans compter que Tolbiac, et dans une moindre mesure Sagamore (qu’elle voyait moins), n’était pas pour l’aider. Elle soupira. Ses yeux verts, qui tendaient à s’embrumer, se posèrent sur sa bague. Deux corbeaux incrustés de petits rubis. Elle ne sut pas pourquoi, mais ses pensées allèrent vers le comte de Rochefort, le gentilhomme qui l’avait sauvé in extrémiste du coup bas de Chagny. Normalement, un regard sur ce bijou lui évoquait d’autres souvenirs, bien moins agréables que le beau comte. Et c’est vrai que son sauveur était bel homme. Grand brun aux yeux bleus. Des traits avenants. Ce jeune homme (Macha était sûre qu’il était plus jeune qu’elle) était vraiment charmant. Ses joues s’empourprèrent. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas ressenti un tel sentiment pour un représentant de la gent masculine. Elle se mit à espérer pour le revoir bientôt, histoire de changer un peu d’air.

La tête ailleurs, Macha ne vit pas Tolbiac qui arrivait dans la mezzanine. Il ne savait pas s’il intelligent de sortir son amie de ses rêveries. Il s’y risqua. Le sourire niais que les lèvres de son amie affichaient lui laissait entendre qu’elle était de bonne humeur.
« _Perdue dans ses pensées ? »
L’intéressée tourna ses yeux vers son interlocuteur. Elle fronça les sourcils. Quel casse-pied celui-là. Il n’aurait pas pu attendre qu’elle redescende de son petit nuage ! La jeune femme espérait juste que le mousquetaire ne l’avait pas vu rougir.
« _De fortes agréables pensées que tu viens d’assombrir par ta présence, lui dit-elle sur un ton monocorde.
_ Veillez m’excusez mademoiselle, je vous voulais point vous distraire, se moqua-t-il.
_Tu cherches à prendre un tabouret en pleine tête de bon matin ou es-tu juste très mal réveillé ?
_J’opte pour la seconde option. Cependant tu me vois surprise de te voir ici de si bon matin. Serais-tu tombée du lit ?
_Ha ha ha. Non, j’ai perdu l’habitude de dormir dans un lit de paille. Sans compter qu’un éléphant a martelé les marches de l’escalier tôt ce matin. J’ose espérer pour toi que ce pachyderme n’était autre qu’Enguerrand.
_Je lui avais pourtant bien dit d’être discret ! Il était encore saoul quand je l’ai levé pour qu’il parte prendre son tour de garde. Il est incorrigible ! Enfin, je pense qu’il peut s’estimer chanceux que tu ne te sois pas occupé de lui avant qu’il ne parte. »
Oui, effectivement, chanceux était le terme approprié. Mais Macha n’avait pas l’intention de laisser cet incident sans conséquence.
« _Et toi, animal stupide, tu n’es jamais à ta caserne ?
_Bien sûr que si miss mal réveillée ! Pourquoi crois-tu que je me sois apprêtée ce matin ? Monsieur de Tréville est soucieux. Le Grand Monsieur* est retiré à Blois depuis un bon moment. Il craint que ce dernier ne soit encore en train de comploter contre son frère, Sa Majesté le Roi. »
Macha haussa les épaules. Les intrigues de cours ne l’intéressaient guère. Que ce soit Louis XIII ou Gaston duc d’Orléans qui gouvernait la France lui importait peu. Cependant, les paroles du mousquetaire n’étaient pas dénuées d’intérêt. Si le frère du roi n’était pas présent à Paris, cela signifiait que Sagamore non plus. D’un côté, cela arrangeait la jeune femme : pas de dispute et de duel en vue. De l’autre, elle aurait bien voulu revoir son ancien « ami ». Bien que sa relation avec le bras armé de Gaston d’Orléans fût tendue, celle-ci s’efforçait, peut-être en vain, de renouer un contact plus amical.

Le duo d’escrimeur fut vite rejoint par une Margot encore très endormie et un Toulousain frais comme un gardon. Ce dernier était le plus âgé du groupe, mais il semblait être aussi le plus vif. Comme à son habitude, l’apothicaire se montra très aimable. Il se rendit au cellier pour remonter de quoi nourrir les nouveaux levés. L’enfant fut vite éveillée et réclama une leçon à la jeune femme. Cette dernière accepta.
Malheureusement, cela ne se passa pas comme prévu. Alors que le groupe se restaurait encore, Enguerrand arriva. Étrange qu’il soit déjà de retour. Macha sentit le pire. Elle avait bien raison. Mais avant que le garde du cardinal ne puisse dire un mot, il reçut un trognon de pomme en pleine tête.
« _Dit donc monsieur le vicomte de malpolie ! Si jamais je te prends à faire l’éléphant dans l’escalier lors que le soleil n’est pas encore levé, je te passe par une fenêtre ! C’est clair ? »
Enguerrand la regarda avec des airs un peu ahuri, et encore enivré.
« _J’ai pourtant été discret ce matin, s’étonna-t-il
_Aucun qu’une horde cheveux en plein galop sur les pavés ! »
Le garde du cardinal s’excusa mainte fois après de la jeune femme. Vu ce qu’il devait lui annoncer, il fallait mieux qu’elle soit de « bonne » humeur. Mais Macha était loin d’être une idiote. Enguerrand la soupçonnait de déjà savoir la raison de son retour précoce.
« _En fait, reprit l’éléphant d’une voix hésitante, si je suis ici…
_C’est que son Éminence veut me voir c’est ça, l’interrompit-elle.
_Oui.
Macha poussa un long soupir en s’enfonçant sur son siège. Il s’attendait à cela, mais ces paroles ne lui firent pas plaisir. Bien au contraire ! Richelieu ne pouvait-il pas la laisser tranquille ? Après trois semaines en sa compagnie, se languissait-il déjà de ses effronteries ?
« _Tout de suite…dit timidement le garde. »
Il savait pertinemment que ce genre d’injonction n’avait pas d’effet sur son amie. Il se contentait juste de faire suivre les ordres du cardinal.
« _Et bien son Éminence attendra ! Je n’ai pas fini de manger et je ne me suis pas encore toilettée. De plus, il devrait savoir que je n’aime pas les ordres, se moqua-t-elle. »
Comme la faire changer d’avis était une tâche impossible, Enguerrand se joint à la tablée et se restaura avec ses compagnons. Après tout, rien de plus simple de se dédouaner auprès de Richelieu en évoquant le caractère borné de la jeune femme.

Macha ne s’était pas pressée pour se préparer. Elle avait brossé consciencieusement ses cheveux, les avait noués avec des petits liens de cuir avant de les repousser en arrière avec son habituel bandeau verdâtre. Et malgré cela, de longues mèches rebelles lui tombaient sur le devant du visage. Tout en se vêtant, elle se souvient des propositions de cadeaux que lui avait faits Richelieu lors de son séjour à Luçon. Peut-être aurait-elle dû l’accepter quelques vêtements supplémentaires. Sa garde n’était pas si que cela. De plus, un second corset, noir, n’aurait pas été de trop.
Bien sûr, elle avait ses armes à sa ceinture. Elle n’aimant pas les baudriers pour porter sa rapière et sa jian. De plus, et malgré son corsage, elle n’appréciait guère la lanière qui passait au niveau de sa poitrine. C’était inconfortable. Sa ceinture maintenant très bien ses armes par ailleurs.
Macha avait conservé sa belle chemise de soie blanche. Non pas qu’elle souhaitait offrir un spectacle réjouissant à son Éminence, mais elle n’avait pas eu le courage de changer de vêlement. De plus, sa tunique de lin sentait le fauve. Incommoder l’odorat du cardinal lui aurait fort plus mais elle avait un peu de respect pour elle-même.
La jeune femme fut surprise de ne pas avoir été conviée au Louvre, comme Richelieu l’avait jusqu’à présent, mais vers un palais que ce dernier se faisait construire non loin de celui du Roi.
Comme elle s’y attendait, l’homme d’État la fit patienter en compagnie de son ami. Elle ne fut pas mécontente d’avoir quelqu’un avec qui discuter. S’il y avait bien une chose qu’elle détestait, c’était d’être mandé, puis de poireauter comme un légume dans un potager, en attendant le bon vouloir du jardinier pour le cueillir.
Le pauvre Enguerrand se fit une nouvelle fois réprimander pour sa discrétion du matin. Il n’osa pas opposer de résistance à la jeune femme. Après tout, il avait plus que de raison et n’avait pas pu se lever sombre. Il éluda le sujet vers les événements de la veille. Mais cette fois-ci, ce fut celle qui évinça le sujet. Ce fut alors qu’on la fit entrer, seule, dans le cabinet du cardinal. Enfin.
Richelieu était installé derrière son secrétaire à griffonner sur du papier. Surement des affaires d’État. Mais la jeune femme, de relative mauvaise humeur, n’avait nullement envie d’attendre que ce dernier lève le nez de sa paperasse. Elle entama les hostilités, sur un ton ouvertement provocateur et insolent.
« _Je suis à peine partie que vous me rappelez déjà à vos côtés. Mon impertinence vous manquerait-elle tant que cela ?
_ S’il y a des choses qui ne me manquent pas chez vous, c’est bien cela. Je pourrais ajouter l’insolence et la grossièreté pour compléter la liste de vos principaux défauts, mais je ne vous ai pas fait appeler pour mettre en évidence les plus mauvaises parties de votre personne, répondit-il sans lever les yeux sur elle.
_J’espère bien, votre Éminence !
Le cardinal poussa un soupir. Cette jeune femme était désespérante. Et le pire dans tout cela, c’est qu’elle prenait un malin plaisir à se montrer odieuse. En homme intelligent, Richelieu savait qu’il y avait des combats qu’on ne pouvait pas gagner.
Pour aller encore plus loin dans la provocation – après tout ce dernier ne lui avait pas lancé un regard —, Macha alla s’appuyer sur son bureau tout en se tenant la tête. À ce moment-là, elle s’amusa intérieurement de ne pas avoir un sublime décolleté. La vision qu’aurait eue l’homme d’État aurait pu mettre en émoi n’importe quel abstinent. Une nouvelle fois, le cardinal soupira. Décidément, le culot de la jeune femme n’avait pas de limite.
« _Une des choses que j’aime chez vous, c’est votre allure hommasse. Ainsi, on ne pourrait point dire que vous tentez d’obtenir mes grâces par votre… charme.
_Il n’y a qu’une seule chose que je souhaiterai obtenir de vous, votre Éminence, mais je me semble que vous ne soyez pas disposé à me l’offrir. Sinon, je ne serais pas ici. »
À ce moment-là, une personne entra dans la pièce pas une porte secondaire, presque dissimulée par une teinture. Trop contente de mettre Richelieu en mauvaise posture, Macha ne bougea pas d’un cheveu. Elle tourna la tête vers le nouvel arrivant. Le sourire de provocation resta sur son visage, mais dans sa tête ce n’était plus le même sentiment qui l’animait.
Toujours penché sur ses papiers, le cardinal prit la parole.
« _Comte de Rochefort. Je crois que vous connaissez déjà cette charmante demoiselle.
_Effectivement votre Éminence. J’ai eu le plaisir de croiser son chemin, répondit-il un grand sourire aux lèvres.
Macha se releva. Cette rencontre lui plaisait. Elle ne s’attendait pas à revoir son sauveur ici. Bien que ces retrouvailles lui fussent fort plaisantes, la jeune femme se doutait bien que cela n’avait rien à voir avec la convenance. Bien au contraire.
« _Vous si vous me disiez de quoi il retourne, reprit la jeune femme d’un air plus sérieux et un poil agressif. Si nous nous trouvons tous les deux ici, ce n’est surement pas pour le plaisir de se dire bonjour. De plus, vous n’avez pas vraiment l’air de vouloir nous accorder plus de temps que cela.
_Et vous avez parfaitement raison ma chère. Je vous ai réuni pour deux raisons. La première, et je pense qu’elle va vous réjouir, c’est que monsieur de Rochefort va s’occuper de poursuivre la secte de l’Horloger. Ainsi je vous libère d’une charge qui, il me semble, ne vous plaisait guère.
_Votre Éminence est trop bonne, cracha Macha.
_En outre, j’aimerai que vous dissiez tout ce que savez sur ce groupe de terroriste. Cependant, je souhaiterai que vous restiez, si possible, à disposition de Rochefort. Au cas où ce dernier ai besoin d’une assistance de qualité et fiable.
_Je ne suis pas de vos soldats que l’on place sur les ordres du premier venu, rugit la jeune femme.
Une fois encore, Richelieu la prenait pour un de ces pions. Il ne manquait vraiment pas de toupet celui-là. Il la décharge de son enquête – à son grand soulagement –, mais il la place sous la tutelle d’un autre homme ! Macha fut prise de l’envie sauvage d’écraser la tête du cardinal sur son bureau.
Le comte intervint alors.
« _Soyez sûr, mademoiselle, que je ferai appel à votre service seulement en cas d’extrême nécessité et selon votre bon vouloir évidement, tenta-t-il de la rassurer. »
L’intéressée lui jeta un regard noir. En se voulait diplomate, Rochefort ne faisait qu’accentuer sa colère. Comme si elle allait avoir le choix ! Le cardinal avait Enguerrand sous la main en cas de refus. Les missions changeaient, mais la pression, elle, restait.
« _Vous savez où vous pouvez vous les carrez vos paroles pour m’amadouer ! Parce que vous croyez vraiment que je vais avoir le choix ! Ha ! »
Bien qu’il ait été prévenu, le comte ne s’attendait à temps de véhémence, et de grossièreté, de la part de la jolie brune. Comme Richelieu le lui avait dit, son tempérament était encore plus chaud que le feu. Cela contrastait énormément avec la femme qu’il avait rencontrée au marché la veille. Décidément, Macha avait tout pour plaire.
« _Je suis ravi, ma chère, que cette proposition vous enchante, ironisa son Éminence.
_Allez vous faire foutre, rugit-elle encore en tapant des poings sur la table.
_Mademoiselle ! Un peu de respect, s’offusqua Rochefort.
_Cela ne sert à rien de tenter de lui demander de montrer une once de respect si elle n’a en pas l’envie, continua Richelieu sur un ton monocorde à l’attention du comte. Vous vous en apercevrez fort vite d’ailleurs. »
Pour la première fois depuis le début de l’entrevue, le cardinal leva la tête vers ses interlocuteurs. Son regard se posa sur Macha. La jeune femme était rouge de colère, les mains sérés. Il allait devoir annoncer la suite des événements avec tact s’il voulait éviter qu’elle ne fasse voler son secrétaire.
« _ Comme votre relation part sur une mauvaise base, j’aurai espéré, ma chère, que vous accepteriez d’accompagner Rochefort lors d’une mission. Oh, je vous rassure, vous ne serez pas obligé d’y prendre part. Mais il est possible que votre charme, tout féminin qu’il est, puisse être une aide précieuse. »
_J’espère pour vous que c’était bien la seconde raison de ma présence ici. Sinon…
_Ce sera tout, conclut sèchement l’homme d’État.
Ou une manière subtile de congédier Macha et Rochefort. La jeune femme hésitait à sortir par la porte principale et à péter un scandale dans le couloir, ou suivre Rochefort par la porte dissimulée. Comme Enguerrand avait dû partir pour prendre son tour de garde, inutile de repasser par le chemin de l’allée. Elle suivit donc le comte qui lui ouvrait la voie.
Juste avait qu’elle ne referme la porte, Richelieu l’interpella.
« _Au fait, mes espions m’ont informée que Sagamore était en ville alors que son maître est encore à Blois. »
La jeune femme ne dit rien. Elle ne savait pas si cela était une information grassement donnée ou s’il s’agissait d’un message plus subtil du genre : le Grand Monsieur prépare probablement un mauvais coup.




*manière d’évoquer Gaston d’Orléans, frère de Louis XIII.
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