Clair-Obscur

La veine palpitait sous ses lèvres, fébrile et envoutante. La peau tendre céda sous la pression de ses canines. Le liquide vermeil inonda sa bouche, chaud et savoureux. Le vampire resserra son étreinte, la femme gémit dans ses bras. Il comprima la chair douce du cou et bu goulûment. Cathal se laissa envahir par les sensations que la morsure produisit. Il ferma les yeux d'aise. En quelques secondes, le sang, au contact de la salive de la créature, fit son effet. Telle une drogue, il pénétra chaque fibre de son corps, se propagea le long de chaque nerf. Le feu délicieux provoqua une montée d'adrénaline et de testostérone. Les bienfaits de l'apport ne tardèrent pas à se manifester. Son cœur accéléra, il sentit ses forces se décupler, ses sens s'aiguiser tout comme sa verge durcit d'avantage. Cathal donna un coup de reins brusque à sa partenaire d'une nuit. La femme se cambra de plaisir sous la violence du geste. À peine avait-il léché lentement la plaie pour qu'elle se referme qu'il reprit ses va-et-vient avec frénésie. Son amante d'un soir cria sous ses assauts. Il avait faim, faim de sexe et n'allait pas s'en priver, après tout, elle l'avait emmené dans son appartement pour cela.

Une fois repu, le vampire se leva, s'habilla, déposa un billet de deux cents euros sur la table de nuit et partit sans un regard pour la femme endormie. Le soleil était déjà haut dans le ciel depuis quelques heures et avait réchauffé l'intérieur de sa jaguar XJ. Après une vingtaine de minutes, Cathal s'engagea dans le sentier menant à sa demeure. La bâtisse, un corps de ferme restauré, était nichée dans une clairière entourée de forêt. La grille automatique s'ouvrit et se referma derrière son véhicule. Les rayons de l'astre du jour nimbaient d'or et de rose l'ancienne maison de grès rose et de granit.

Il posa les clefs sur la console de verre de l'entrée et s'installa dans un des confortables fauteuils de cuir blanc du salon. Cathal secoua ses longs cheveux de jais, étendit ses grandes jambes gainées de cuir noir. Il saisit la télécommande de la chaîne hifi restée sur l'accoudoir et mit en route l'appareil. Son album préféré était encore dans le chargeur. La musique ne tarda pas à s'élever.

Les premiers accords de A Surbur to Hell de Thérion se firent entendre. Il ferma les yeux et se laissa emporter par la mélodie gutturale. Une fois, la chanson achevée, il déplia sa haute silhouette et se dirigea vers la salle de bain attenante à sa chambre. L'eau tiède coula sur sa peau, il la frictionna pour en faire partir l'odeur déposée par la femme. À chacun de ses mouvements, ses muscles saillaient. Qaund il sortit de la douche, le gel avait laissé sur lui un soupçon de parfum de santal. Ses pieds humides tracèrent de légères empreintes sur le sol de marbre bleuté, jusqu'à son lit de bois sombre. Il se glissa sous les draps de satin noir et ne tarda pas à trouver le sommeil. Quelques heures plus tard, alors que le soleil était à son zénith, il ouvrit les yeux et s'étira tel un fauve. Un sourire se dessina sur son visage anguleux, Cathal était satisfait de sa nuit. Il n'aurait pas besoin de sang avant au moins deux semaines et la femme avait contenté son appétit. Il se leva, tira les rideaux de velours pourpres et observa le jardin en contre-bas, il admira la roseraie où croissaient de nombreuses fleurs odorantes. La piscine scintillait sous la lumière solaire, il descendit et vêtu de son plus simple appareil plongea dans l'onde tiède. Après plusieurs brassées, il sortit et le corps ruisselant, alla cueillir quelques roses, il en huma le parfum avec délectation. L'un des plaisirs du vampire était de voir ses fleurs s'épanouir et embaumer son jardin.

Une fois un rapide repas avalé, Cathal se dirigea une des dépendances où une salle d'entraînement avait été aménagée. Dès qu'il le pouvait, le guerrier s’exerçait tant au combat à l'épée qu'aux nombreux arts martiaux qu'il maîtrisait. Les murs de la pièce étaient soit recouverts d''épées, de sabres, de couteaux, de poignards et de tout ce qui pouvait être utile pour tuer, soit d'espaliers. Le mannequin d'entraînement subit ses violents assauts. De tous les arts, Cathal préférait le maniement des lames quelles qu'elles fussent. Après plus de deux heures d'exercices, il s'assit le dos contre la paroi et laissa aller sa tête contre un pilier de bois où était accroché la seule décoration de la salle : un tableau représentant un guerrier en armure qu'un de ses clients avait peint pour lui. L'Orgharr1 se remémora un bref instant comment il l'était devenu.

Théoriquement il y aurait du y avoir un flashback, mais c'est devenu une archive mis en fin du chapitre lorsqu'il sera fini...

Que les années avaient été dures pour moi dans cette citadelle perdue dans le désert perse. Je venais de ma lointaine Irlande. Je me souviens encore de mon arrivée chez les sotrans2, présenté par Arawn. Le seigneur sotran m'avait toisé avec mépris malgré mon amitié avec mon accompagnateur. J'appris par la suite qu'il vouait une profonde aversion pour notre prince à tous. Je fus traité comme un animal, mais voyant que je ne me plaignais jamais, il s'était intéressé à moi. Des heures et des heures, je subis leurs entraînements aux différentes armes, aux diverses techniques, à parfaire tous mes talents vampiriques. Tout ce que je ne savais pas, et j'ignorais tant de choses, m'y fut enseigné, jusqu'à ce que je devienne moi-même l'arme la plus mortelle. J'eus même l'occasion de perfectionner ma science de la forge et appris à confectionner des épées, des poignards solides et superbement ciselés. Quand je fus jugé apte à servir, je fus renvoyé auprès d'Edern. Bien des années s'étaient passées... Astrid, ma créatrice, m'attendait.