Chapitre 25 : La lettre
Plus le temps passait, plus Salyna se retrouvait seule. Elle avait très mal pris ce que Barruth lui avait suggéré et donc elle ne lui rendait plus visite. Pour elle, il y avait maintenant trois camps dans cette guerre : Les Rïlthded, les Rebelles et elle.
À présent, elle menait elle même ses propres actions contre ses ennemis, en particulier contre Freihred.
Ce qu'elle voulait c'était lui pourrir la vie, le rendre fou. Et ça, elle savait très bien le faire, c'était même sa spécialité.
Elle se glissait comme de l'eau à travers le sol dans le château, elle saccageait tout, indisposait ses repas, narguait la garde et s'échappait comme l'air entre les feuilles des arbres.
Elle humiliait ses hommes en plein milieu de la Cité. Qu'ils soient à 2, 3 ou 4, elle les mettaient tous à terre, le tout acclamée par la foule qui lui faisait une hais d'honneur lorsqu'elle s'enfuyait à l'arriver d'un bataillon ou de renfort. Même Bromvel n'arrivait plus à l'approcher.
On lui avait confier beaucoup de travail administratif à faire et donc il arrivait sur les lieux des affrontements toujours trop tard et quand il errait dans la forêt dans l'espoir qu'elle lui tombe dessus : rien.
Et une fois qu'elle avait pénétré dans la forêt, impossible de penser la retrouver.
Et plus ça allait, plus elle semblait insaisissable et ça, Freihred ne le supportait pas.
Comment une simple femme pouvait elle lui glisser entre les mains aussi facilement ? Il regrettait amèrement cette fois où, à 16 ans, elle s’était jetée sur lui pour le tuer ; il regrettait de ne pas l'avoir tué sur le champ, au lieu de la torturer avant qu'elle ne se fasse libérer par ses amis rebelles. Il maudissait ce jour.
Et c'était sur Bromvel qu'il passait sa colère. Car LUI, il aurait eu mille occasions de la tuer ou de l'enfermer, mais au lieu de ça, il avait traité avec elle ! Cette sauvageonne !
Le Général subissait les colères de son supérieur en silence. En même temps il n'avait pas trop le choix. Il savait très bien que s'il le contrariait trop, il le renverrait au pays.
De quoi enfoncer le clou dans la botte de Freihred, les rebelles se faisait également de plus en plus virulent ? De nombreux sabotages, aussi bien sur terre lorsque les chargements de munitions étaient détruits lors de leur transport vers des villages plus isolés, que sur mer, alors que les bateaux étaient coulés avant même d'approcher des côtes du Pays du Chêne.
Peut-être que la guerre arrivait enfin à un tournant, c'est ce que Salyna espérait.
Ce jour-là, Salyna avait (encore) pénétré dans le château au nez et à la barbe des gardes.
Elle était passée par les cuisines afin de voler de la viande séchée (c'était quand même moins chiant que de la préparer, soit même) et maintenant elle déambulait dans les couloirs en boulottant une pomme comme si elle était chez elle.
Mais, et c'était bien là son principal défaut, elle se sentait trop vite en confiance dans se château qu'elle connaissait si bien, et ne se méfiait plus assez.
Bromvel discutait, dans la cour intérieure, avec quelques soldats qui reprenaient du service après une violente altercation avec la jeune fille. Et alors qu'il leur donnait leurs instructions, il la vit passer à une fenêtre.
Il congédia rapidement ses hommes et s'engouffra dans l'édifice de pierre afin de lui tomber dessus au détour d'un couloir (s'il réussissait). Il finit par l'apercevoir dans un escalier qui montait à l'étage des chambres.
_*La bibliothèque... * pensa-t-il
S'il se dépêchait, il pourrait la devancer et l'attraper afin de l'enfermer dans la bibliothèque afin de pouvoir parler.
Il savait que la jeune fille prêtait l'oreille pour entendre d'éventuel bruit de pas dans les couloirs pour ne pas se faire surprendre. Il prit donc grand soin de ne pas faire de bruit avec ses bottes.vPar contre, elle, elle en faisait sans s'en soucier.
Il se mit à l'angle des deux couloirs, bien plaqué contre le mur de façon à ce qu'elle ne le voie pas, car si c'était le cas, elle n'hésiterait pas à s'enfuir dans l'autre sens, voire même de passer par la fenêtre la plus proche.
Il attendit un maximum que les bruits de pas soient au plus près, et qu'en il jugea que c'était le bon moment, il déboula sur elle.
Surprise, elle n'eut rien le temps de faire, à part lâcher sa pomme.
Le Général lui attrapa violemment la mâchoire afin qu'elle ne crie pas et aussi pour mieux la maîtriser. De son autre main, il ouvrit rapidement la porte de la bibliothèque qui était juste au coin et la poussa brutalement dans la pièce sans la lâcher.
Après ce bref instant de surprise, elle reprit ses esprits et assigna au Général un violent coup de pied dans le tibia. Mais il ne la lâcha pas pour autant. Elle essaya de le faire lâcher en lui saisissant à deux mains le bras avec lequel il la tenait.
_ » Non ! Écoutez-moi ! Je veux simplement vous parler ! S'il vous plait ! »
Elle se calma et desserra doucement ses mains du bras du Général, afin de montrer sa bonne volonté. Puis ce fut à son tour de lâcher la mâchoire de Salyna. Ils avaient tous les deux le souffle cour.
Il recula un peu afin de lui laisser un peu d'air, puisqu'il savait qu'elle avait horreur qu'il soit si près.
_ » Qu'est-ce que vous me voulez ? » ne s’énerva elle
_ » pas si fort, on pouvait nous entendre... on est en sécurité aussi. »
_ » Avec la pomme qui traîne dehors, oué, ça risque d'attirer l'attention. »
_ » Attendez, je vais voir. »
Il ouvrit la porte afin de regarder s'il y avait quelqu'un, et de ramasser la pomme à moitié manger qui gisait sur le sol.
Lorsqu'il re-rentra dans la pièce, il comprit vite son erreur. La jeune fille avait un pied sur le rebord de la fenêtre.
Il se précipita et l'attrapa à bras le corps par la taille et la retira en arrière et ils tombèrent tous les deux à la renverse. Salyna poussa un cri de colère et se dégagea de l'étreinte du Général avant de sortir son arme et de le menacer.
_ » Foutez-moi la paix ! Laissez-moi partir ou je vous tue ! »
Le Général se releva doucement avec les deux mains en évidence pour pas qu'elle ne s'énerve plus.
_ » J'ai... j'ai quelque chose pour vous.... » dit il attelant.
Il glissa doucement sa main vers l'intérieur de sa veste, mais Salyna l'interrompit. Elle savait que c'était souvent une arme à feu qui se trouvait dans les poches intérieures des grandes vestes des militaires. Elle s'approcha doucement, et voulu attraper ce que le Général avait dans sa poche, mais alors qu'elle avait saisi un bout de papier, il lui attrapa le poignet et la fit pivoter afin de lui coincer le bras dans le dos et saisit avec son autre main, le bras avec lequel la jeune fille tenait son arme. Il rabattit son arme contre la gorge de Salyna afin qu'elle n'ait pas de geste brusque.
_ » Écoutez-moi ! Écoutez-moi ! »
Il essayait de la maîtriser alors qu'elle se débattait violemment. Voyant qu'il n'arriverait à rien, il se décida, à contrecœur, de lui faire une entaille dans la gorge avec sa propre arme afin de lui montrer qu'il ne plaisantait pas. Elle poussa un petit « haaa » lorsque la lame trancha sa chaire, et elle sentit le sang couler dans sa nuque. Elle se calme alors un peu.
_ » Excusez-moi pour ça, mais il fallait bien vous calmer un peu « lui susurra t il à l'oreille.
_ » Lâchez moi ! « elle eu un mouvement vif pour se dégager, mais le Général la tenait fermement. Elle était totalement à sa merci, et chose encore pire que ça, il était dans son dos, donc elle ne pouvait le voir.
_ » Écoutez-moi... » reprit-il
_ » oui c'est ça j'ai compris, autre chose ? » répondit elle ironiquement.
_ » La guerre est finie »
_ » c’est sur que si vous me tranchez la gorge, elle sera finie pour moi, merci de l'info ! »
_ » Ce n'est pas mon intention, mais si je vous lâche, vous allez, vous, me tuer. »
Et il savait qu'elle le ferait.
_ » OK..., je lâche mon arme. » Dis elle.
Elle ouvrit doucement la main et son épée tomba au sol. Un petit geste du pied, elle l'éloigna d'elle et du Général.
_ » Content ? »
_ » Je n’ai pas confiance, alors on va rester comme ça jusqu'à ce que j'ai fini de vous dire ce que j'ai à vous dire. »
Elle essaya une fois de plus de se dégager, mais rien n’y fit.
_ » Bon alors c'est quoi vos trucs ? »
_ » J'ai écrit au Roi en votre nom. »
_ » QUOI ? »
Elle donna un coup de talon dans le tibia qu'elle avait déjà frappé en espérant que cette fois la douleur le ferait lâcher, mais non.
_ » J'ai dit que vous ne vouliez pas vous exposer, car vous craignez pour votre vie. Que vous refusez de traiter avec Freihred, car il a assassiné votre père, mais que vous seriez prête a le faire avec quelqu'un d'autre. »
_ » Vous croyez me faire gober ça ? Même si c'était vrai, je pourrai largement mentir sur mon identité et profiter de la situation ! Votre lettre n'a servi à rien ! »
Elle tourna sa tête par-dessus son épaule afin d'essayer de voir son agresseur. Le résultat fut qu'elle se retrouva quasiment nez à nez avec le Général. Du mieux qu'elle put elle le défia du regard.
Son regard était vraiment d'un jaune profond. Le Général trouvait vraiment ses yeux magnifiques, telles deux topazes, embellies encore par des mèches de cheveux bleu clair qui lui traversaient le visage.
_*Elle est si belle*, pensa-t-il en la voyant ainsi. Il eut envie de l'embrasser. Mais le souvenir de sa précédente tentative le fit se retenir.
_ » Non justement ! Ça n'a pas été en vain ! J'ai la réponse, là dans la poche.... attrapez là. »
En la guidant avec sa propre main, il fit attraper à la jeune fille le bout de papier qu'elle avait commencé à saisir quelque instant plus tôt.
Puis elle la lut.
Lorsqu'elle l'eut fini, le Général la sentit se détendre sous son étreinte. Il desserra alors les poings pour la laisser libre. Elle ne réagit pas immédiatement, elle était trop plongée à relire cette fameuse lettre.
Il la contourna afin de voir son visage. Elle était au bord des larmes et ne cessait de parcourir le papier des yeux.
Et il y avait de quoi. Elle n'arrivait pas à croire ce qu'elle lisait.
Il était écrit que, selon la volonté du frère du Roi en charge de la pacification du Pays du Chêne, si la jeune princesse était encore en vie comme on le lui avait prouvé, elle était libre de circuler comme bon lui semble entre les deux Royaumes, et d'entamer des négociations avec le Haut Commandement qu'elle désirait. Et que par conséquent, le pays n'était plus une région de Rïlthded, mais une sorte de colonie semi-indépendante dont le statut serait l'enjeu des négociations mener avec la Princesse. Et que jusqu'à l'arrivée du Chancelier, cette personne était intouchable.
Après l'avoir relu plusieurs fois, elle releva la tête et essuya le rebord de ses yeux. Elle ne tourna vers le Général, mais elle ne savait pas quoi lui dire. Elle était sans voix. Ne sachant que dire, elle relut une nouvelle fois la lettre. Mais cette fois son visage s'assombrit puis elle releva la tête violemment vers Bromvel.
_ » C'est une fausse ? C'est ça ? Vous vous foutez de ma gueule pour que je vous facilite la tâche ? Hein ? » s'énerva-t-elle
_ » non ! Non c'est la réalité ! La guerre est finit Salyna ! »
Elle était complètement perdue à présent. Elle alla s'assoir sur l'un des fauteuils qui se trouvaient dans la bibliothèque. Elle était soudain devenue pale et se senti nauséeuse.
_ » Ça va ? » s'inquiéta Bromvel.
_ » Oui... heu.... enfin je crois... c'est si.... enfin..... je «
Elle ne savait vraiment pas quoi dire. Elle resta silencieuse encore un moment puis reprit ses esprits.
_ » Freihred est-il au courant ? » demanda-t-elle avec gravité.
_ » Non, et il faudra lui faire croire que c'est vous qui avez envoyer la lettre, non moi. »
_ » Très bien.... Merci Général. »
Son coeur battait à tout rompre et elle se sentit plus libre, comme si une charge lui avait été retirée des épaules.
_ » Bon, je crois qu'il est tant d'aller faire chier notre très cher Commandant » repris elle avec un sourire jusqu'aux oreilles.
Avant de quitter la pièce, elle s'arrêta à hauteur du Général.
_ » Général, je... Merci. »
Elle lui tendit sa main.
_ » Ami ? »
Ce dernier sourit et lui serra la main en lui répondant : ami.
Puis elle s'éloigna à reculons en lui souriant. Comme un enfant à qui on venait de donner une sucrerie. Puis elle quitta la pièce en courant.
Elle se précipita en courant dans le bureau de son ennemi qu'elle allait enfin mettre à terre.
Sur sa route, elle bouscula plusieurs gardes, avant d'enfoncer la porte du bureau de Freihred comme une sauvage, et de s'assoir sur son bureau comme une invitée.
Surpris et débouté par cette entrée peu ordinaire, il appela tout de suite les gardes avant de pointer son arme sur elle.
_ » Sale petite garce ! Tu ne t'en tireras pas comme ça cette fois. » Rugit-il ?
_ » Hé si ! Car je suis intouchable ! »
Elle lui fit son plus beau sourire niais en lui mettant la lettre sous les yeux.
Il se saisit de la lettre et la lue.
_ » Cette lettre n'a aucune valeur ! Je vais te tuer sale garce ! »
_ » Si vous me tuer, vous aurez de graves problèmes, vous n'étés pas le premier à qui je montre cette lettre. »
C'est à ce moment précis que Bromvel, faisant semblant d'arriver alerter par les cris des soldats arriva dans la pièce.
_ » Je reprends mes négociations avec le Général Bromvel. Quant à vous commandant, vous pouvez rester maître de vos troupes, ça ne me gêne pas. Mais au premier écart, je vous fais mettre en prison jusqu'à l'arrivée de votre Chancelier. Est-ce bien clair ? »
Freihred bouillonnait, son arme était toujours pointée sur la jeune fille. Sa main tremblait de colère, et il finit par baisser son pistolet.
_ » Est-ce bien clair ? » reprit-elle.
Un « oui » à peine audible sorti alors de sa bouche.
_ » Pardon, j'ai pas très bien entendu ? Oui qui ? »
Elle voulait l'entendre dire, elle voulait l'humilier devant ses hommes qui étaient sur le pas de la porte et qui regardaient la scène incrédule.
_ » Oui...... Princesse. »
_ » Merci, Commandant. »
Elle descendit alors du bureau et s'adressa à Bromvel.
_ » Général, faites diffuser la nouvelle partout dans le pays, et que des festivités sont organisées. Et renseigner vous savoir quand votre Chancelier arrive qu'on puisse organiser un accueil digne de se nom.
_ » Bien, Votre Majesté. Garde ! Garde-à-vous. »
Tous les soldats se mirent alors en ligne et laissèrent passer la jeune fille comme si de rien n'était.
Et, pour la première fois depuis des années, elle sortit par la grande porte principale du Château.
La nouvelle se diffusa rapidement, et de nombreuses fêtes furent célébrées. Tout le peuple était en liesse.
Le premier à féliciter Salyna fut Barruth, à qui elle avait pardonné pour ses propos.
Bromvel qui était déjà apprécié fut respecté à partir de ce moment.
Tout allait bien, sauf pour Freihred. Il ne supportait pas cet affront qu'on venait de lui faire, et ne pensait qu'à une chose : se venger.